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UNE ŒUVRE ESPAGNOLE D’ÉDUCATION

qu’en 1914. Dans cet intervalle de trente-quatre ans se livrèrent, autour du testament, des luttes qui rappellent, toutes proportions gardées, celles que suscita chez nous la discussion des lois de 1881 et 1882.

Les éléments conservateurs, sous prétexte que G. Allende était mort en confessant la foi catholique, prétendaient remettre à l’Église la conduite des nouvelles écoles. Les éléments libéraux, excipant des idées bien connues du testateur sur la prééminence du pouvoir civil et des termes mêmes du testament qui prescrivait trois écoles, sans rien spécifier quant à la nature de l’enseignement ni à la qualité des maîtres, déclaraient que, légalement aussi bien que moralement, eux seuls étaient aptes à remplir, dans la lettre et dans l’esprit, les intentions du fondateur. Leur interprétation du testament n’avait d’ailleurs rien de subversif ni de menaçant pour la foi chrétienne. Ils adoptaient le programme d’enseignement des écoles nationales, en tête duquel figure le catéchisme romain, — le catholicisme étant, en Espagne, religion d’État. Ce qui n’empêcha pas, naturellement, leurs adversaires de les accuser de vouloir faire « des écoles de perdition… des écoles sans Dieu ».

À ces disputes d’ordre, — si l’on peut dire, — métaphysique, s’ajoutaient les difficultés nées du particularisme provincial, très marqué en Espagne, comme on sait, et plus ou moins ouvertement opposé à l’ingérence de l’État dans les affaires locales. L’État, de son côté, se souciait peu d’agir. Il attendit treize ans pour « classer » la fondation, c’est-à-dire pour déterminer son caractère de « donation particulière faite au bénéfice d’une collectivité, et aux fins spéciales d’enseignement », ce qui coupait court aux prétentions de différentes administrations, publiques ou privées, désireuses de s’adjuger les biens de la fondation Allende.

Ceux-ci, pendant ce temps, peu ou mal gérés, devenaient ce qu’ils pouvaient. Des rentes s’accumulaient sans emploi, des ventes illicites s’effectuaient, diminuant les biens-fonds sans qu’une justification suffisante fût produite de ces opérations. Il y avait bien un comité local de surveillance (Junta de patronos), mais qui semblait plutôt avoir besoin lui-même d’être surveillé. En 1911, enfin, sous la pression de l’opinion publique de Toro,