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L’ENSEIGNEMENT DES INDIGÈNES EN ALGÉRIE

qui l’a racontée le premier, l’avait recueillie en 1882. Cela se passait au milieu des incertitudes du début, lorsque des maîtres nouvellement débarqués de France croyaient tout simple de faire la classe en Kabylie comme ils avaient l’habitude de la faire en Vaucluse ou dans le Pas-de-Calais. Mais les choses ont depuis changé. Le personnel enseignant est aujourd’hui autrement dressé, il a fait son apprentissage. Nous avons vu que le décret de 1892 dispose formellement que dans les écoles indigènes ne doivent être appliqués que des programmes spéciaux. Ces programmes sont ceux de 1890, établis par des hommes dont on ne saurait récuser la compétence. Nous admettons avec Burdeau qu’ils pour raient être encore allégés par une simplification des études d’histoire et de grammaire. Toutefois, nous souvenant que les écoles indigènes doivent être, comme on l’a dit heureusement, des écoles élémentaires de civilisation, nous ne regretterons pas trop qu’on se soit préoccupé de donner aux élèves, avec la connaissance sommaire du français et les notions usuelles les plus courantes, une idée très simple, mais très suggestive dans sa simplicité, de la communauté nationale et de cette humanité civilisée dans laquelle il s’agit de les introduire. Remarquons d’ailleurs que le meilleur du temps est consacré à l’étude du langage français parlé, de la lecture, de l’écriture, du calcul, enfin au travail manuel qui, dans la Kabylie notamment, fait de l’époque de scolarité un véritable apprentissage agricole. On comprend mal, après cela, les critiques élevées par le rapporteur du budget de l’Algérie, exprimant l’opinion « qu’il serait préférable de donner aux indigènes les notions élémentaires de français qui leur sont nécessaires, de leur donner un enseignement professionnel et utile, au lieu d’essayer de leur inculquer un enseignement scientifique et compliqué, dont ils n’ont que faire[1] ». Ce que demande le rapporteur, c’est justement ce qui existe déjà. L’enseignement indigène a ses programmes spéciaux, réduits, ses programmes pratiques à caractère professionnel. Qu’on les revise si l’on veut, qu’on tâche à les rendre plus modestes, plus accessibles, plus utilitaires encore. Mais la réduction des programmes n’implique pas la réduction des crédits, et c’est un étrange moyen de corriger

  1. Rapport de M. Chaudey, p. 69.