Page:Revue musicale de Lyon, année 7, numéros 12-13, 1910.djvu/23

Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’on sait, est un pays d’endosmose slavo-italo-allemande, où tout le monde chante, violonise et gratte de la guitare. En 1836, le gamin, aîné de onze frères et sœurs, est recueilli au pensionnat de Saint-Florian, où il demeure quatre ans. À partir de 1841, il gagne son pain comme maître d’école au village de Windhag-sur-Maltsch, à deux florins par mois (à peine cinq francs), mais il seconde le ménétrier qui fait danser les paysans. Quant à composer, il avait ses promenades pour cela. Il passe ensuite à Kronsdorf près d’Enns. Là seulement, il peut commencer à s’exercer régulièrement sur un piano qu’on lui prête.

En 1845, il est d’abord professeur, puis organiste suppléant à Saint-Florian. Et tout seul, avec une ténacité paysanne, il poursuit si bien ses études musicales qu’en 1856 il sort vainqueur du concours pour la place très disputée d’organiste à la cathédrale de Linz. À cette époque-là, quelques années heureuses où il peut se livrer exclusivement à ses belles grandes orgues et à l’étude théorique. Tous les congés dont il dispose, il les passe à Vienne chez Sechter, le professeur de contrepoint dont Schubert avait voulu être élève et que Bruckner devait remplacer au Conservatoire.

En 1861, Bruckner passe son examen de contrepoint à ce Conservatoire, et le Maître de Chapelle de la Cour, Herbeck, épouvanté de sa force, s’écrie : « Mais c’est lui qui devrait nous examiner ! » Lui seul ne croit pas encore à sa maîtrise, il étudie encore deux ans, l’orchestration surtout, de sorte qu’il en a quarante lorsqu’il se juge digne d’entreprendre une grande œuvre, sa première messe, en mineur (1864). En 1865, il est à Munich, pour la première de Tristan, comme Smetana, le maître tchèque, et pourtant, ce qui déjà doit ressembler le plus à Parsifal, dont pas une note n’est écrite, c’est certain Tantum ergo qu’il a composé en 1845, trente ans avant l’ouverture du théâtre de Bayreuth et trente-six avant la première de Parsifal.

En 1867, Herbeck appelle Bruckner à Vienne, à la chapelle de la cour, et lui obtient la place de Sechter au Conservatoire.