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veloppement industriel d’un peuple que pour la préparation d’un armement puissant, il est à craindre que de nouvelles luttes encore plus vives ne se produisent à l’avenir pour la possession de ces éléments vitaux. Une pareille guerre en Europe peut facilement devenir une lutte à mort, car si toutes les expériences techniques accumulées au cours de la présente guerre et qui furent appliquées intégralement dans sa dernière phase seulement, servent déjà à la préparation d’une nouvelle guerre, si les savants et les techniciens continuent leurs recherches pour la production de nouveaux gaz vénéneux et de nouveaux explosifs, l’intensité et l’horreur d’une guerre future est difficile, sinon impossible à concevoir. Les moyens de destruction ont revêtu aujourd’hui un tel caractère d’intensité qu’à l’avenir aucun pays ne pourrait efficacement s’en servir pour sa défense. Il suffira de leur application pour semer la mort et l’anéantissement partout.

La défense militaire, dans le sens traditionnel du mot, a donc été rendue illusoire par le développement de la science moderne. Ce qu’il nous faut aujourd’hui et ce qui peut sauver notre vieille civilisation d’une ruine totale, c’est uniquement le réveil moral qui établira les relations des peuples sur une nouvelle base. Le règne de la confiance doit succéder au régime des armements. À cette condition, la technique aura le pouvoir et le moyen de préparer un avenir de prospérité pour les peuples civilisés de notre monde. La technique scientifique est une conquête qui entraîne de grandes responsabilités. Elle peut nous mener au cataclysme final ; elle peut au contraire nous ouvrir des voies insoupçonnées de salut.

Ne serait-il pas possible, puisque une relation directe entre la guerre, les poisons et l’hygiène publique est manifeste, que la Croix-Rouge trouvât moyen de rappeler à nouveau le danger de l’emploi des gaz vénéneux, et d’aider en quelque mesure à sauver l’humanité d’une nouvelle catastrophe dont les conséquences seraient infiniment plus terribles ?