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H. STAUDINGER

Professeur de chimie à l’École Polytechnique, Zurich.

La technique moderne et la guerre.

Au début de l’année 1918, alors que les dernières découvertes de la science et de la technique avaient perfectionné à l’extrême les engins de guerre et étendu au delà de toute prévision les possibilités de destruction, le Comité International de la Croix-Rouge lançait aux belligérants un appel où se trouvait le passage suivant :

« … Bien loin d’atténuer les maux qu’entraîne la guerre, on peut dire que les progrès de la science dans l’aéronautique, la balistique ou la chimie, n’ont fait qu’en aggraver les souffrances et surtout les étendre à toute la population en sorte que la guerre ne sera bientôt plus qu’une œuvre de destruction générale et sans merci.

« Nous voudrions aujourd’hui élever la voix contre une innovation barbare que la science tend à perfectionner, c’est-à-dire à rendre toujours plus homicide et d’une cruauté plus raffinée. Il s’agit de l’emploi des gaz asphyxiants et vénéneux dont, paraît-il, l’usage va aller en augmentant dans des proportions qu’on ne soupçonnait pas jusqu’ici. »[1]

Cet appel adjurait l’humanité de ne pas faire usage au cours de la lutte des moyens de destruction effroyables inventés en dernier lieu, mais de placer les lois de l’humanité et le souci du genre humain au-dessus de l’égoïsme national.

Cet appel ne trouva alors aucun écho, et aujourd’hui après le passé terrible et devant l’avenir si sombre, il aura sans doute été oublié par la plupart de ceux qui l’auront lu.

Néanmoins, dans la période critique que nous traversons, au moment où se discute l’avenir de l’humanité, il est plus important que jamais de faire ressortir le sens profond et la portée de l’appel du Comité.

Ces dernières 50 années ont apporté au monde des révolu-

  1. Voy. Bulletin international, T. XLIX, 1918, p. 185.