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ment plus original des Befane, poupées qu’en suspendait aux fenêtres, le 6 janvier, cibles grotesques offertes aux flèches des passants ; le carnaval, jour cher aux bouffons et aux marchands d’oies.

Où éclate l’esprit politique des Florentins, c’est dans les jeux privés ou de société, tous ingénieux et stimulants pour l’intelligence, quelques-uns drôles. Sacchetti nous montre ses compatriotes jouant aux échecs et aux dames dans les rues ; de simples paysans y sont de première force. La coda est le jeu favori des enfants ; plusieurs d’entre eux, formant queue, essayent de passer à travers les bras entrelacés de deux de leurs camarades qui leur interdisent ou leur laissent le passage, selon qu’ils se disent Gibelins ou Guelfes.

Ces deux hommes que vous voyez là, assis à la même table, chacun devant une pièce d’argent, sans autre mouvement d’ailleurs que celui de leurs yeux, ces deux hommes-là jouent. À quoi ? À la mouche ; la première mouche qui se posera sur une des deux pièces décidera du vainqueur. Tout le mérite du jeu consiste dans l’art de « corriger la fortune » en attirant l’insecte ; la palme à qui dissimulera le miel dont il enduit la pièce. C’est de la politique en miniature.

Quant aux jeunes gens, les exercices plus mâles du torneo (tournoi) de la giostra (joute) du calcio (ballon) les passionnent. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

Bien portant, le Florentin cherchait ses distractions dans des jeux directement ou indirectement intelligents ; malade, les spectacles d’adresse adoucissaient ses tourments ; et nous voyons vers 1340 un Corsini souffrant faire appeler des jongleurs dans sa chambre et s’en trouver mieux que des pilules — dont Hippocrate nous préserve ! — des apothicaires du temps[1].

Le cérémonial des mariages empruntait à la politique ses formes extérieures. Un orateur haranguait les époux sur le seuil de leur porte[2]. Puis on dansait, entre deux rangées de colonnettes supportant un pavillon de voiles rouges et blancs, au son des trompette de la commune, les dames avec leurs longues robes mouchetées de fleurs d’or, leurs escoffions massifs ou leurs toques de plumes

  1. Perrens citant Cibrario, loc. cit.
  2. Voir la très intéressante Storia degli usi nuziali du comte De Gubernatis