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intérêts complexes, il fallait à l’écrivain une longue connaissance de la question et de remarquables qualités de méthode et de précision.

M. G., qui a été poète avant de se consacrer à l’histoire et qui n’a pas encore renoncé à ses anciennes amours, s’est fait une loi rigoureuse de la division des genres ; il est un des défenseurs les plus intransigeants de la sévérité scientifique ; il se résigne facilement au doute et il préfère ne pas satisfaire la curiosité de ses lecteurs plutôt que de recourir aux combinaisons ingénieuses et aux inventions psychologiques. C’est le meilleur moyen d’inspirer la confiance ; nous nous sentons sur un terrain solide et nous suivons sans résistance un guide si prudent. La critique de M. G. n’est-elle pas cependant par moment un peu timide ? C’est un beau défaut que d’être trop vertueux, mais on peut pécher aussi par trop de scrupules.

Les questions nationales tiennent de nos jours une telle place dans les cœurs, que les historiens les plus soucieux de la vérité ont été entraînés à leur faire dans le passé une part un peu excessive. M. Goll a parfaitement raison de dire que les souvenirs d’une commune origine et les parentés de races ne suffisent pas à créer des alliances politiques, et que les décisions des hommes d’état sont déterminées par des considérations pratiques et non par des sentiments mystiques. Nous sommes encore de son avis quand il se refuse à retrouver au XVe siècle les haines ethnographiques qui jouent un si grand rôle à notre époque. Peut-être seulement pourrait-on dire qu’il se préoccupe un peu trop de réagir contre l’opinion contraire ; qui dit réaction dit polémique et par conséquent exagération. Et sans doute M. G. est plus près de la vérité que ses adversaires, mais il s’en rapprocherait davantage encore, il me semble, s’il n’avait pas songé à eux.

Ce sont là des critiques bien subtiles ; elles ne déplairont pas sans doute à M. Goll qui aime qu’on serre les textes de près. Sur les conclusions d’un ouvrage qui soulève de si importantes questions, la discussion est toujours possible ; sur la valeur durable de l’œuvre du moins, aucun dissentiment ne saurait s’élever et le livre de M. Goll mérite certainement d’être mis en bon rang parmi les travaux fort distingués qui nous arrivent de l’Université tchèque de Prague.


E. Denis.


Vauban. Seine Stellung in der Geschichte der Nationalœkonomie und sein Reformplan, von Dr Friedrich Lohmann. Leipzig, Duncker et Humblot, 1895. In-8o, 172 pages.


Un ouvrage allemand sur Vauban envisagé comme économiste ne peut manquer de piquer la curiosité du public français. Nous signalons avec d’autant plus de plaisir la remarquable étude de M. L. qu’elle rectifie sur plusieurs points l’opinion qu’on se faisait généralement des