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Pulcherrimo erat rex iste ingenio, et admodum animosus, luctator egregius [etc., etc…]. In vernacula lingua artificiosissimus compositor : cujus codices plurimi et cantilenae memoriter adhuc apud Scotos inter primos habentur. Artificiosum libellum de Regina, dum captivus erat composuit, antequam eam in conjugem duceret : et aliam artificiosam cantilenam ejusdera, yas sen, etc., et jucundum artificiosumque illum cantum : at beltayn, etc.[1].

Il est assurément difficile de se débarrasser d’un témoignage pareil ; non seulement le don poétique est reconnu à Jacques, mais son œuvre principale est nettement désignée ; le petit livre ou cahier, « libellum, » qu’il composa d’une plume habile sur la reine, au temps qu’il était captif, ne peut être que le Kingis Quair ou « Cahier du Roi. » M. Brown l’a reconnu lui-même (p. 19). Son raisonnement pour écarter Major est le suivant : Major attribue à Jacques des chants qu’il n’a pas composés ; les poèmes qui commencent par « Yas Sen » et par « At Beltayn, » sont postérieurs au temps où il vécut ; Major, s’étant trompé sur ces deux points, peut très bien s’être trompé sur l’autre, donc son témoignage est sans valeur (pp. 19, 20).

C’est le genre de raisonnement qui avait été appliqué déjà aux scribes du manuscrit. Mais ici il s’agit d’un personnage d’un peu plus d’autorité que les scribes ; de plus et surtout les erreurs qui lui sont attribuées n’ont été nullement commises par Major.

Major nous dit que Jacques composa, outre son principal poème, divers autres chants charmants, et deux en particulier qui avaient plu par-dessus les autres à l’historien, puisqu’il les cite à part, celui qui commence par « Yas Sen » et celui qui commence par « At Beltayn. » Au xviiie siècle, lorsque l’attention fut appelée à nouveau sur Jacques Ier, on s’empressa de rechercher quels pouvaient être ces chants. Percy, Pinkerton, Tytler, etc., formulèrent des suggestions très risquées, d’abord parce que l’identification est peu commode, ensuite parce que leurs connaissances grammaticales ne leur permettaient guère de

  1. Historia Majoris Britanniae, fol. cxxxv. — Il ajoute encore quelques renseignements de plus en une fin de phrase fort obscure et dont aucune interprétation satisfaisante n’a encore été fournie (cf. Brown, pp. 12 et 90) : « Quem alii de Darketh et Gargeil mutare studuerunt : quia in arce aut camera clausus servabatur in qua mulier cum matre habitabat. » Tous ces détails montrent, en tous cas, que Major ne se borne pas à une simple allusion plus ou moins vague ; il s’agit de faits sur lesquels il insiste, ayant pris la peine de se renseigner.