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prince à son peuple. Il est certain que, si les Allemands ont parfois critiqué la conduite absolutiste de leurs princes, c’est surtout en se plaçant au point de vue de la conception religieuse de l’absolutisme luthérien. Mais au fond, le principe même de l’absolutisme des princes n’a cessé d’être respecté. Beaucoup, peut-être, désiraient être mieux gouvernés, mais fort peu auraient eu l’idée de se gouverner par eux-mêmes. Ils respectaient leurs princes, s’ils ne les aimaient pas ; quand ils se détournaient d’eux, c’était pour reporter leur confiance sur leurs successeurs, et leur mécontentement même était encore un hommage rendu à leur absolutisme et à leur souveraineté.

Ce résumé, à la fois trop long et trop bref, de quelques-uns des principaux chapitres, suffira pour donner une idée du caractère original et vraiment personnel d’un livre dont la lecture est pénible, mais qui mérite cependant d’être lu. En dépit des critiques qu’il comporte, il est remarquable par l’éminente sincérité de la pensée, par la finesse des aperçus et l’abondance des réflexions. Nous en avons dit assez pour montrer combien est féconde la méthode qui y est appliquée et aussi pour faire pressentir l’intérêt des polémiques que cet ouvrage a soulevées, polémiques qui ont eu leur écho dans l’intéressant congrès des historiens à Innsbrück sur lequel nous reviendrons prochainement.


Georges Blondel.


S. Charléty. De B. Villario (Balthazar de Villars), etc. Paris, Hachette, 1896. In-8o, 143 pages, avec deux figures.


M. C. ne m’en voudra pas de dire que le principal intérêt de son livre réside ailleurs que dans la figure assez pâle de son héros. Né à Lyon, en 1557, d’une famille de marchandise, de robe et d’église (c’est d’une des branches de cette famille que sortira le maréchal de Villars), il fut successivement avocat à Paris, conseiller au parlement de Dombes, lieutenant particulier de la sénéchaussée de Lyon, puis, aux lieu et place de son beau-père Nicolas de Lange, lieutenant général et président du présidial, enfin premier président de Dombes et trois fois prévôt des marchands de Lyon[1]. Il s’acquitta de toutes ces fonctions avec probité, mais il les aurait traversées sans gloire si les troubles de la Ligue n’eussent mis à l’épreuve ses vertus civiques. Catholique fervent, il resta royaliste ; il encourut, de la part des ligueurs, l’honorable reproche de n’avoir pas « tousjours préféré à l’Estat l’honneur de Dieu et l’advancement de la foy catholique A. et R. » (p. 14, n. 1). Suppression de traitement, interdictions de séjour, exils même, il supporta tout plutôt que de se joindre aux rebelles.

Mais, encore une fois, l’intérêt de l’étude de M. C. est ailleurs. La vie

  1. Voy. à l’appendice des pièces sur cette famille.