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l’éloge du clergé westphalien au XVIe siècle. Qu’on trouve alors dans le peuple comme dans les prêtres des traces de corruption, cela ne fait aucun doute, mais en tirer un tableau comme celui qui nous est donné, c’est faire à la fantaisie une trop large part[1].

On lira avec plus de profit les passages consacrés à décrire l’influence de la Réforme sur les transformations politiques et économiques de l’Allemagne. Lamprecht y met en lumière l’influence décisive de Luther et l’importance de son ouvrage sur la puissance temporelle (Von weltlicher Gewalt), paru à la fin de l’année 1522 et d’après lequel le prince doit se distinguer à quatre points de vue : par sa confiance envers Dieu et l’ardeur des prières qu’il lui adresse ; par son amour envers ses sujets et son chrétien désir de leur rendre service ; par la prudence et la circonspection avec laquelle il doit se comporter vis-à-vis de ses conseillers et des puissants qui l’entourent ; enfin par la sévérité impartiale et intelligente avec laquelle il doit sévir contre les malfaiteurs et les coupables. Et je crois volontiers avec lui que l’opinion publique, à cette époque où Machiavel écrivait précisément son livre « Du Prince, » ne repoussait point, chez les souverains, un absolutisme radical, teinté seulement d’esprit patriarcal et de sentiments chrétiens. Ces sentiments se sont maintenus chez les Allemands, au cours du XVIIe siècle, tant que les grandes impulsions données par Luther sur le terrain religieux ont prévalu. Lamprecht croit que l’Allemagne a repoussé l’idée d’absolutisme telle que la concevait le droit romain, autant que les idées anti-monarchiques venant de France, d’Espagne ou d’Écosse, ou que les théories des calvinistes, celles, par exemple, d’un Languet ou d’un Hotman, sur le contrat qui unit le

  1. C’est surtout dans les tomes IV et V qu’on pourrait relever un grand nombre d’erreurs de détail. Dans le dernier volume, Rachfahl n’en dénonce pas moins de douze en quelques pages (p. 551 à 570) : sur l’inquisiteur Hulst, sur le rôle de la Consulta, sur l’assemblée des chevaliers de la Toison d’or de 1562, sur le rôle des membres du conseil d’État après la chute de Granvelle, sur les premières relations de Calvin avec les protestants de Paris, sur la situation au point de vue financier des rebelles, sur celle des protestants après 1555, sur le rôle des archiducs Albert et Isabelle, etc. Le même travail de critique peut être fait pour les pages 661 à 674. On pourrait faire ressortir aussi la preuve de la précipitation avec laquelle l’ouvrage est écrit : p. 722, on nous dit que Gustave-Adolphe débarqua le 26 juin 1630, et p. 727 nous voyons que le débarquement eut lieu le 26 mai. — S’il y a dans l’ouvrage beaucoup d’idées personnelles, il s’y trouve aussi des emprunts trop nombreux faits a d’autres historiens. Rachfahl s’est donné le malin plaisir de mettre en parallèle, sur trois colonnes, les passages similaires de Ritter, de Wenzelburger et de Lamprecht, pour montrer comment celui-ci se permettait parfois de procéder. Qu’il ait intentionnellement voulu supprimer les citations et n’ait donné aucune bibliographie, on le comprend ; mais, lorsque, par hasard, il cite un volume, il faudrait au moins qu’on puisse aisément s’y reporter. La plupart des Allemands seront aussi embarrassés que les Français pour savoir quels sont les ouvrages indiqués par des renvois ainsi conçus (t. IV, p. 283, 394, 395) : Dohme, p. 168 ; Körnicke, p. 60-61 ; V. Liliencron, I, 359, etc.