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n’avait pu tenir ses engagements. Il aurait dû répondre à Tanguy, sous bonnes garanties, des 28,000 écus, avant juillet 1430. Il en cherchait toujours le moyen en 1435. L’hypothèse qu’il avait offerte sur la châtellenie de Romorantin était insuffisante et on avait renoncé à en trouver d’autres plus sérieuses. Cependant, comme Thomas Beaufort mourut sans que Tanguy eût reçu plus de 5,000 écus, la duchesse de Clarence chargea un autre de ses fils, Edmond Beaufort, comte de Mortain, de proposer un arrangement pour les 23,000 écus, dont elle demeurait débitrice. Edmond convint avec le duc d’Orléans (23 décembre 1435) que, du jour où Charles aurait trouvé à désintéresser Tanguy, trois des otages de Buzançais seraient libres et qu’Angoulême lui-même serait élargi si, au commencement de l’année 1436, on pouvait obtenir pour le reste de sa rançon de bonnes cautions chez les banquiers de Londres.

Il parut bien que c’était là trop demander à Charles : ni Tanguy ni les banquiers n’avaient foi en des hypothèques sur des domaines qu’avait ruinés la guerre. En septembre 1436, on débattait comment on assignerait les 23,000 écus sur le revenu des villes et châteaux d’Angoumois. Et, cette fois encore, on manqua le moment de conclure.

Par la victoire de Gergeau (12 juin 1429), sinon par celle de Beaugé, Jean d’Angoulême pensa relever sa fortune ; le bâtard d’Orléans, qui avait fait prisonnier William Pole, comte de Suffolk, eut l’âme assez haute pour ne pas craindre de le traiter en chevalier et de le renvoyer sur parole. Il avait conquis, du coup et pour la vie, l’amitié du prince anglais. Vu sa naissance, Suffolk s’était mis, comme on disait alors, « à grosse finance. » Il consacra les sommes qu’il devait au Bâtard à la rançon d’Angoulême[1] ; il fit mieux, il mit au service de Jean son influence sur ceux qui détenaient le comte[2]. Il sembla dès lors rivaliser de zèle avec Dunois, dont l’ingénieux dévouement ne se lassait pas et savait découvrir les occasions nouvelles d’échanger, contre son frère, des prisonniers anglais : tel, celui qu’il acheta (il donna 3,000 écus de sa bourse) à Guy de Rochechouart, évêque de Saintes ; les 10,000 salus d’or que devait le captif furent payés au profit de Jean d’Angoulême[3].

  1. Brit. Mus. Addit. chart. 3660, 3674-3675. — Arch. nat., KK. 897, fol. 89 vo, 90 ro. — Bibl. nat., Pièces orig. 2158, 8, no  533. — Rymer, V, I, p. 1. — Il nous paraît, d’après ces textes, que Suffolk fut relâché entre le 14 décembre 1430 et le 26 mars 1431 (n. st.).
  2. Arch. nat., K. 64, 3717, 18 ; KK. 897, fol. 89 vo, 90 ro. — Bibl. nat., Pièces orig. 2158, 8, no  533. — Addit. chart. 3660. — Rymer, V, part I, p. 1, et infrà, p. 17-18.
  3. Brit. Mus., Addit. chart. 4403. — Arch. nat., K. 64, 3718, fol. 7 ro ; J. 919,