Page:Revue historique - 1896 - tome 62.djvu/238

Cette page a été validée par deux contributeurs.

il avait deux ressorts : la vicomté où il jugeait par appel, la prévôté où il rendait directement la justice.

Il semble que voilà au moins un premier principe net, et, pour ainsi dire, une loi précise. Il n’en est pas absolument ainsi.

À la date du 23 mai 1369, le roi déclare bien par des lettres patentes qu’il entend que toute la juridiction ordinaire de la ville de Paris appartienne, sans partage, pour lui et en son nom, au prévôt de Paris, que c’est là un fait qui date de temps immémorial, qu’il le confirme pleinement, veut et entend que le prévôt ait seul, à l’exclusion de tous autres juges, la connaissance, correction et punition de tous les crimes et délits qui se commettent à Paris et par quelque personne que ce soit[1].

En réalité, les justices particulières commencent déjà à s’établir et à lutter contre le Châtelet, pour empiéter sur ses droits et obtenir leur indépendance.

Nous ne parlons pas du tribunal de l’official. Ici le privilège de l’évêque de Paris de juger tout clerc est absolu. Il y veille jalousement, et nous verrons à quel point il épie ce qui se passe au Châtelet pour empêcher que le moindre individu soupçonné d’être tonsuré ne continue à demeurer dans la juridiction séculière[2].

Mais il y a déjà les hôtels du roi où les maîtres des requêtes prétendent avoir seuls le droit de juger, ce que leur octroie un édit de 1355, confirmé par lettres patentes du 19 septembre 1406, Ajoutons cependant que provisoirement les maîtres des requêtes n’obtiennent que le règlement des actions civiles. Les affaires criminelles ressortissent encore du prévôt[3].

Les chambellans du roi ont également la prétention de juger tout ce qui appartient à la maison royale. Nous ne savons pas trop comment ils accommodent cette prétention avec le droit des maîtres des requêtes de l’hôtel. Un valet de chambre de Charles VI, nommé Colin Noble, a injurié un homme appelé Jean de Saint-Simon. Jean de Saint-Simon porte plainte au prévôt, qui fait

  1. Delamare, Traité de la police, I, 131.
  2. L’Église dit également qu’à elle seule appartient de juger les cas de sorcellerie. Mais, sur ce point, le droit n’est pas très établi. Les juges royaux s’efforcent de réserver ces affaires à la justice du roi et ils y réussissent généralement. Voy. Registre criminel, II, 311-314.
  3. Ibid., I, 168.