Page:Revue historique - 1895 - tome 57.djvu/70

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sur les constructions, les vieux édifices abandonnés tombent en ruine[1] ou sont, tant bien que mal, appropriés à des besoins impérieux de défense. Un quartier de Nîmes se bâtit dans le cirque[2], le Capitole de Narbonne, la porta Martis de Reims, servent de châteaux forts[3]. Bientôt, il n’y a plus qu’une partie de la vieille enceinte qui soit encore peuplée. Souvent la ville s’est retirée et comme concentrée en un point de son territoire. Elle consiste en un castrum carré, percé de portes, grossièrement construit avec des décombres[4].

De l’ancienne vie municipale, rien ne subsiste plus. Il semble même, tant est grande la variété des noms qu’on donne à ce qui reste des villes, qu’on ait perdu jusqu’à la notion de ce qu’elles avaient été jadis[5].

Cependant, si la vie municipale s’est éteinte, il se manifeste encore dans plusieurs des vieilles villes romaines quelque activité. En effet, le diocèse dont le centre a été placé jadis au chef-lieu de chaque civitas n’a pas disparu, et la présence de l’évêque suffit à animer les cités. Autour de la cathédrale, on rencontre des monastères et des écoles. En face du palatium se dresse la tour de l’avoué ou du burgrave[6]. Ailleurs, ce sont les habitations des milites

  1. Sur l’état de la ville de Worms au commencement du xie siècle, voyez les intéressants détails de la Vita Burchardi, ch. vi (Mon. Germ. Hist. Script., IV).
  2. Flach, op. cit., p. 255.
  3. Flach, ibid., p. 266. — Varin, Archives administratives de Reims, I2, p. 602, 608, 618, 785. — On sait que la porta nigra de Trêves a servi d’église pendant plusieurs siècles.
  4. Flach, op. cit., p. 237, 239, 245. Les castra de Dijon, de Bourges, etc., auxquels viennent plus tard s’accoler les bourgs dont la réunion formera la ville du moyen âge, représentent l’ancienne ville romaine. C’est pourquoi ils portent souvent, dans les textes, les noms de Urbs antiqua, Urbs vetus. Pour l’Allemagne, voyez Rietschel, op. cit., p. 62 et suiv.
  5. Seuls les mots civitas et urbs sont assez régulièrement employés dans le sens de ville épiscopale. À part cela, la même ville peut être désignée par des noms très différents : municipium, oppidum, castellum, burgus, vicus, villa. Celles de ces désignations qui s’appliquent à la ville en tant que forteresse ne se rencontrent pas dans les textes où il est question de simples villages ; les autres (municipium, vicus, villa) sont données aussi bien à l’agglomération urbaine qu’à l’agglomération rurale. Le fait que le mot monasterium désigne parfois une ville montre combien l’élément proprement municipal est de peu d’importance à l’origine.
  6. On pourrait renvoyer pour tout ceci à un très grand nombre de monographies d’histoire locale. Il suffira d’indiquer au lecteur le chapitre déjà cité de Flach, qui contient, pour la France, un très grand nombre d’exemples. Pour l’Allemagne, voyez par exemple Vita Burchardi Wormatiensis, ch. vii. Mon. Germ. Hist. Script., IV.