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qui réside tout entier dans le peuple. On ne peut douter, en effet, qu’à l’origine les bans n’aient été votés par l’université des citoyens, par l’assemblée générale de la commune[1].

C’est au conseil qu’il appartient, en revanche, de juger les contraventions aux règlements urbains. En qualité de juridiction des statuts, il applique souverainement les amendes promulguées par lui contre les délinquants. Pro quacumque commonitione quam fecerint, dit la charte de Noyon, sive pro banno, sive pro fossato vel firmatione ville, neque episcopus neque castellanus habent ibi aliquid justicie vel implacitationis[2].

Le conseil ne constitue pas seulement la juridiction des statuts. Il possède encore une certaine juridiction en matière de police. Dans toutes les villes on le voit exercer une sorte de pouvoir disciplinaire sur la conduite et les mœurs de la bourgeoisie. Les rixes, les injures, les coups et blessures, la débauche scandaleuse, relèvent de sa juridiction[3]. Il est comparable, à ce point de vue, au comité d’une société qui applique aux membres de celle-ci, en vertu d’un statut accepté par eux, les amendes fixées par ces statuts. Ici encore, en effet, la ville n’exerce pas une juridiction publique, mais une juridiction corporative. Son droit de police s’étend à tous les bourgeois, parce que tous appartiennent à la commune et ne peuvent se soustraire à sa discipline intérieure. D’ailleurs cette discipline s’impose aussi aux étrangers. Mais, dans ce cas, la sanction s’en trouve dans l’interdiction qui leur est faite, s’ils ne s’y soumettent pas, de reparaître dans la ville.

Le conseil possède encore la police du commerce et de l’industrie. C’est là une de ses attributions principales, car la ville est essentiellement, nous l’avons vu, un centre commercial. Il fixe l’heure et l’emplacement des divers marchés, établit le prix des denrées, veille à ce que leur qualité soit irréprochable. Il contrôle les procédés de l’industrie, donne leurs règlements aux métiers, institue des inspecteurs du travail[4]. À ce point de vue, les attributions du conseil se rattachent à celles qu’exerçait primitivement le seigneur de la ville.

  1. Voyez le texte cité p. 317, n. 2.
  2. Lefranc, Hist. de Noyon, p. 195. Add., Charte de Vienne, § 76. Gengler, Stadtrechte, p. 538 : Denique statuimus ut 24 civium, qui prudentiores in civitate inveniri poterunt, juramento confirment, quod disponant de mercatu et de universis, que ad honorem et utilitatem civilatis pertinent, sicut melius sciverint ; et quicquid hii deinde in hoc agant et disponant, judex civitatis nullo modo audeat irritare.
  3. Pirenne, Dinant, p. 72 et suiv.
  4. L’Innung, c’est-à-dire le droit de vendre et d’acheter, est conféré dans les villes allemandes par le conseil. Hegel, Städte und Gilden, II, 429.