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de Rouen[1], en Flandre[2], dans le pays de Liège[3], les écoutètes et les mayeurs sont tous des officiers du suzerain. Partout, une partie des amendes qu’ils appliquent revient au seigneur. Enfin, on sait que le serment qu’ils prêtent à leur entrée en charge débute toujours par une promesse de fidélité et d’obéissance au prince.

Toutefois, si le tribunal urbain constitue un tribunal public, si l’officier qui le préside remplace auprès de lui le souverain, par sa composition, par le mode de recrutement de ses membres, il présente un caractère nettement municipal. Tout d’abord, il est régulièrement formé de bourgeois. Pour en faire partie, il faut, non seulement appartenir à la commune, mais encore être propriétaire dans la ville[4]. En outre, dans une mesure plus ou moins large, la commune intervient dans la nomination de ses juges. Partout elle acquiert des garanties contre l’arbitraire possible du seigneur. Ici, elle a un droit de présentation[5] ; ailleurs, on applique le système plus libéral de l’élection[6] ; ailleurs encore, on a recours à des formalités compliquées : élection à plusieurs degrés, tirage au sort, etc.[7], qui ont manifestement pour but d’écarter la brigue et la corruption. En certains cas, il arrive même que la ville ne participe pas seulement à la création des jugeurs, mais aussi à celle de l’officier de justice[8]. Enfin, le serment prêté par celui-ci, à côté de la fidélité jurée au prince, contient l’affirmation solennelle de respecter et de maintenir les privilèges urbains.

Dès le commencement du xiie siècle, plusieurs villes nous apparaissent déjà en possession de leur tribunal propre, de leur échevinage[9]. On voudrait savoir d’où provient celui-ci. Se rattache-t-il à

  1. Giry, Établissements de Rouen, I, p. 15.
  2. Warnkœnig-Gheldolf, Hist. de Flandre, II, p. 149 et suiv.
  3. Pirenne, Dinant, p. 22.
  4. Pour ceci, voyez plus loin, p. 322.
  5. Keure de Gand, § 2 (Warnkœnig-Gheldolf, op. cit., III, p. 227) : Horum (scabinorum) si quis obierit vel scabinatum resignaverit, residui alium eligent et principi praesentabunt et princeps electionem eorum et electum approbabit.
  6. Cives Pictavenses singulis annis eligere debent majorem et duodecim scabinos et duodecim juratos, qui omnes jurabunt coram nobis vel ballivo nostro quod fideliter custodient nos et vitam nostram et honorem nostrum, etc. Giry, Établissements de Rouen, II, p. 154.
  7. Warnkœnig, Flandrische Staats und Rechtsgeschichte, II2, Pièces justif., p. 256, 257. Giry, Établissements de Rouen, II, p. 6, n.
  8. Charte de Fribourg-en-Brisgau (Gengler, Stadtrechte, p. 129) : scultetum quem burgenses annuatim elegerint, dominus ratum debet habere et confirmare. Cf. plus haut, n. 6.
  9. Je me sers du mot « échevinage » pour désigner le tribunal public de la