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INTRODUCTION.

IMPORTANCE DE L’ART DE BATIR. — Lorsqu’on se rappelle que les ingénieurs et les architectes sont chargés de présider aux constructions qui abritent les hommes, les animaux et les produits du sol, que ce sont eux qui élèvent ces milliers d’usines et de manufactures où s’exerce une si prodigieuse industrie, ces villes immenses décorées de splendides monuments, et traversées par des fleuves resserrés et encaissés dans des murailles cyclopéennes, ces bassins de pierres, ces docks où se réfugient des flottes entières ; que ce sont eux qui facilitent les communications des peuples entre eux par la création des routes et des canaux, jetant des ponts sur les rivières, des viaducs sur les vallons, perçant des tunnels au travers des montagnes ; que ce sont eux encore qui rassemblent les eaux surabondantes des lieux bas et humides, pour les déverser sur des landes arides et stériles, livrant ainsi à l’agriculture d’immenses étendues de terrain, modifiant et embellissant l’aspect du sol, ne reculant devant aucune difficulté, mais écrivant partout par des monuments durables et bienfaisants la puissance du génie et de l’industrie de l’homme ; quand on réfléchit à l’immense utilité, à l’absolue nécessité même de ces entreprises, aux millions qu’elles absorbent et aux armées d’hommes qu’elles occupent, on est naturellement conduit à apprécier l’importance de la science à laquelle on doit ces merveilleuses créations, et à sentir que ses moindres progrès intéressent tous les pays du globe.

Dans cette branche de travaux chaque partie se multiplie à l’infini ; il ne saurait y avoir de petites économies ; chaque détail est répété des millions de fois : il importe donc de coustater tout ce qui peut lui faire faire un pas.

CONDITIONS DES PROGRÈS DE L’ART DE BATIR. — Le fondement de la science dont nous allons nous occuper repose sur l’expérience des choses faites. La science abstraite, en s’appliquant à ces expériences, parvient à les classer, à les combiner, et à faire entrevoir la possibilité d’applications nouvelles, de procédés nouveaux, qui doivent obtenir à leur tour la sanction de l’expérience avant d’avoir droit à une entière confiance. Les sciences mathématiques ne sont pas encore arrivées à ce point de perfection qu’elles puissent nous donner à coup sûr les instructions que demande la pratique ; il faut que toutes ses formules soient modifiées par les enseignements que fournit l’expérience.

A l’heure qu’il est, c’est donc encore l’expérience ou la pra-