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REVUE DU PAYS DE CAUX

Candidats impériaux.

Elle était déjà assez plaisante, l’aventure de M. Jacques Lebaudy cherchant une petite langue de terre sur la côte d’Afrique pour s’y proclamer empereur du Sahara ; encore que l’histoire ne semble pas au bout des amusantes péripéties qu’elle comporte, la risée publique en a déjà fait justice. Mais voici un projet bien plus curieux. Le roi de Portugal — vous entendez ? — aurait dessein de réunir l’Espagne au Portugal et de se proclamer empereur d’Ibérie… avec le concours de l’Angleterre. In cauda venenum. Sans ce dernier correctif, la chose ne serait qu’une agréable bouffonnerie. Ceci lui donne du corps ; et, mon Dieu ! puisque la Russie prend la Mandchourie avec le concours de tous les silences, pourquoi le Portugal ne prendrait-il pas l’Espagne avec l’appui de l’Angleterre ? Sans s’attarder aux différences, vous trouverez des journalistes convaincus que la chose est possible et que l’entourage du roi Édouard la discute sérieusement. Quant au roi de Portugal, il a dû s’amuser grandement en apprenant l’ambition qu’on lui suppose ; il s’amusera bien davantage à entendre, lors de sa prochaine visite à Paris, les chansons rosses que cet incident ne manquera point d’inspirer à la muse de M. Fursy.

Politique Russe.

Car, c’est un fait ; la Russie a pris la Mandchourie et personne n’a dit : ouf ! C’est le 15 octobre que devait s’opérer l’évacuation. Ni vu ni connu. La Russie, ce jour-là, s’est promenée les mains dans les poches en regardant courir les nuages et personne ne s’est risqué à lui rappeler une date de si peu d’importance et un engagement de si médiocre intérêt. Les Japonais en avaient bonne envie et l’on dit même que s’ils avaient insisté, plutôt que de les rosser, ce qui eut nui à ses prétentions pacifiques, la Russie leur eût offert la Corée en manière de dédommagement. Mais après s’être consultés avec leurs alliés britanniques, les Japonais n’ont plus bougé et tout est rentré dans un calme relatif et temporaire.

Une sorte de vice-royauté moscovite avait été créée, d’ailleurs, en ces lointains parages. C’était, à la fois, la mise en pratique d’un procédé de gouvernement qui a réussi aux Anglais mais que les Russes n’avaient pas encore employé — et l’indication très nette