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CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

le « Démosthène Magyar » mourut à Turin, il y a six ans. On avait levé son exil, mais lui, n’avait pas voulu rentrer vivant. Il rentra mort et, sur le passage du train qui ramenait sa dépouille, 50.000 Hongrois se trouvaient à genoux… C’est dire avec quel enthousiasme les fêtes de son centenaire viennent d’être célébrées. Peut-être les Habsbourgs eussent-ils paru mieux inspirés en s’associant délibérément à ces fêtes ; peut-être le vieil empereur-roi François-Joseph eut-il agi sagement en déposant sur la tombe de son ennemi une palme de réconciliation… et de reconnaissance aussi ; car, enfin, cette Hongrie sur laquelle il règne et qui, riche et prospère, est aujourd’hui le plus solide rempart de sa dynastie, c’est bien celle de Kossuth. Un autre patriote, d’un opportunisme génial, a su l’organiser ; c’est à Deak que revient cet honneur. Mais qui l’avait remise debout, sinon Kossuth ? Kossuth lui avait insufflé ces vertus héroïques, ces sublimes audaces, cette indomptable énergie qui n’ont pas seulement provoqué la révolte épique de 1848, mais qui, appliquées depuis aux progrès de la civilisation et aux arts de la paix, ont porté la Hongrie à un degré de force et de prospérité digne de son antique passé.

Ce passé a reparu récemment aux yeux des Magyars. Peu après le centenaire de Kossuth, on a inauguré à Kolozsvar une statue équestre du roi Mathias. Roi à quinze ans, fils du célèbre héros Jean Hunyade, vainqueur des Turcs, des Bohémiens, des Allemands, Mathias Corvin fut aussi un faiseur de lois justes et un protecteur éclairé des lettres et des arts. Nul, probablement, n’est plus populaire en Hongrie, hormis Kossuth. Et le hasard a été ingénieux en rapprochant ainsi ces deux illustres noms. Mathias Corvin n’eut point de successeurs dignes de lui ; des princes incapables laissèrent péricliter son héritage et, trois siècles durant, la Hongrie fut la proie des Autrichiens et des Turcs. Kossuth la rendit à elle-même.

Les généraux Boers en Europe.

Il est impossible d’apporter à l’exécution d’un douloureux et difficile devoir, plus de dignité, de vaillance et d’honnêteté que les généraux Botha, De Wet et de la Rey n’en avaient mis à remplir, au début, leur rôle de « nobles mendiants ». Les ovations