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REVUE DU PAYS DE CAUX

En Australie, la France est peu connue et mal jugée ; il serait nécessaire de travailler à la formation, dans ces régions, d’un courant francophile susceptible d’atténuer quelque peu l’effet éventuel d’une hostilité pleine d’inconvénients. Mais ce qu’il faut éviter par dessus tout, c’est que le Siam ne devienne, soit par le fait des Anglais, soit par celui des Japonais, un foyer d’action anti-française. Il y a évidemment deux façons d’y parvenir : établir notre protectorat sur le royaume de Chulalongkorn ou nous poser en champion de son indépendance. Toute la question siamoise tient en ces deux termes, et c’est pour n’avoir pas su nous décider en faveur de l’un ou de l’autre que sont nées la plupart des difficultés auxquelles le ministre des Affaires étrangères a tenté récemment de mettre un terme par une convention qui est l’objet d’appréciations très différentes et très passionnées. On reproche à cet acte une modération qui pourrait bien être de la sagesse : modération relative d’ailleurs et qui ne ressemble en rien à de la faiblesse : le Siam fait d’importantes concessions, mais la France en fait de son côté et l’esprit, dans lequel la convention est rédigée, est manifestement un esprit de concorde et de conciliation. Si la convention est approuvée par le parlement Français, ce qui à vrai dire ne parait pas certain, une ère de détente pourra en résulter : indiquons cette possibilité avec soin, car il en sera du traité souriant de 1902 comme du traité comminatoire de 1893 ; tout dépendra de la façon dont il sera exécuté. Si l’on n’apporte pas plus de suite, de volonté et d’adresse à poursuivre l’exécution du second qu’on n’en a mis à appliquer les clauses du premier, on n’aura rien gagné à changer de méthode. Le dilemme en tous cas reste entier : il nous faut un Siam ami ou soumis.

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L’heure n’est pas à ces sombres pensées. Les voyageurs qui ont répondu à l’invitation du Comité de l’Exposition sont tout au plaisir et à la fierté d’admirer l’Indo-Chine. Leur longue mais attrayante navigation a pris fin ; ils ont franchi le canal de Suez ; ils ont fait escale à Colombo et se sont promenés dans les grandes allées rougeâtres sous les palmes géantes ; ils ont parcouru le luxueux quartier européen et le curieux quartier chinois de Singapour ; ils ont aperçu enfin les rives escarpées et boisées du cap Saint-Jacques ; ils ont joui de trouver Saïgon si prospère et de