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de la domination Chinoise passaient sous le protectorat incontesté de la République.

Les deux hommes, dont la valeur professionnelle et l’entêtement génial nous avaient valu la conquête définitive de ce radieux empire, ne survécurent pas à leurs succès. L’amiral Courbet mourut à bord de son navire dans la torpeur de l’été chinois ; qui ne connaît les pages admirables dans lesquelles Pierre Loti a raconté ses derniers moments ? Quant à Jules Ferry qui, depuis deux ans, imposait à une chambre des députés, incapable de se hausser à son niveau, une politique dont les événements ont, depuis lors, pleinement justifié les vues, sinon tous les procédés — il fut, pour ainsi dire, chassé du pouvoir dans une séance tristement mémorable, au milieu d’outrages et d’injures qui prouvèrent que seul le président du conseil gardait son sang-froid. C’était l’affaire de Lang-Son qui servait de prétexte en cette circonstance aux énergumènes de la Chambre. Il eut suffi à Jules Ferry de rendre publiques les négociations qui se poursuivaient et allaient aboutir, trois jours plus tard, pour se justifier, en montrant que Lang-Son ne modifiait en rien les dispositions de la Chine prête à s’avouer vaincue ; mais il préféra se taire, tant pour assurer le succès des négociations que par dédain pour ses ennemis.


L’Organisation de la Conquête

Les élections de 1885 se firent, en partie, sur cette question : on sait quels en furent les résultats. Mais, ce qu’on oublie généralement, c’est que la Chambre, issue de ces élections, n’eut rien de plus pressé que de s’occuper de l’évacuation du Tonkin, ce qui équivalait à la perte de l’Indo-Chine. Les coloniaux ne doivent pas oublier que M. Henri Brisson, devenu président du Conseil après la chute de Jules Ferry, tint vaillamment tête à l’orage ; ils n’oublieront pas, non plus, qu’un membre de la droite — un seul — Mgr Freppel, évêque d’Angers, parla et vota pour le maintien du drapeau sur ces rivages lointains, ce qui lui valut les injures de ses collègues ; vingt-deux droitiers avaient été invalidés ; ce petit fait sauva le Tonkin et les crédits nécessaires à l’occupation furent, cette année-là, votés par 274 voix contre 270. L’extrême-gauche votait avec la droite et l’aidait dans sa campagne anti-