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REVUE DU PAYS DE CAUX

Travaux d’Hercule.

Les Russes entreprennent, avant même que le fameux Transsibérien soit achevé, la construction d’une ligne nouvelle d’Orenbourg à Taschkent par la mer d’Aral et la vallée du Syr-Daria. Cette ligne qui prolonge celle de Moscou à Orenbourg par Samara rejoindra le Transcaspien à Samarkand, longeant ainsi les frontières de l’Afghanistan à une distance qui, sans menacer l’indépendance de ce pays, est faite néanmoins pour inquiéter les Anglais. Ceux-ci d’ailleurs ne sont pas en reste pour ce qui concerne les entreprises géantes ; les améliorations certaines, introduites par eux en Égypte, ne leur suffisent plus. Ils rêvent de métamorphoser ce pays à l’aide du Nil. Bonaparte, le premier, avait entrevu de son regard génial les richesses que l’Égypte pouvait tirer de la régularisation du cours du Nil ; il construisit le premier barrage ; mais c’est aux sources du grand fleuve qu’aujourd’hui l’ingénieur Willcocks veut s’en prendre ; à la suite d’études sérieuses dont il expose le résultat en un langage très clair, M. Willcocks pense qu’au moyen de six barrages établis à des points déterminés, on peut non seulement accroître dans des proportions énormes le rendement du sol Égyptien, mais assainir une grande partie du Soudan, le rendre propre à la culture des bananes et à l’élevage des autruches, fertiliser la péninsule de Meroe, transformer en vastes champs de riz les marais du Bahr el Ghazal, enfin, donner à la production du coton un développement considérable. Les conclusions de M. Willcocks, en faisant même la part d’un enthousiasme exagéré, sont peu discutables en principe ; le caractère bienfaisant et avantageux de ces grands travaux est tellement certain qu’ils s’accompliront fatalement ; mais leur prix de revient sera énorme et les finances Égyptiennes fussent-elles à même d’en supporter le poids, que le contrôle international auquel ces finances se trouvent soumises s’interposerait néanmoins. S’il est permis de prophétiser en pareille matière, il nous semble probable que ces travaux seront entrepris grâce à une collaboration de l’Égypte et des États Sud-Africains, le jour où la colonisation Britannique du Sud aura rejoint celle du Nord et où Ouadelaï sera devenu un centre de transactions rapides entre la région du Cap et la région du Caire.