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REVUE DU PAYS DE CAUX

trompe l’œil dès que nous en prenons les résultats au pied de la lettre. La dénomination de socialistes attribuée au parti vainqueur n’est pas exacte au sens où nous l’entendons en France ; électeurs et élus, dans ce parti, tendent au socialisme d’État, c’est-à-dire que ce sont des nationalistes à tous crins ; ils se désintéressent parfaitement de ce qui se passe au dehors, dès que cela ne sert pas leurs desseins et leurs intérêts ; ils sont Allemands avant tout et ne seraient pas les moins bons défenseurs de la patrie Allemande du jour où elle se trouverait menacée. Le droit, l’humanité, la solidarité, tout cela c’est de la matière à discours pour eux et rien autre. Ils poursuivent une organisation sociale dont nous avons dit l’an passé[1] ce que nous pensions ; elle nous paraît irréalisable et nous croyons qu’elle aboutira à une diminution certaine de la production et par conséquent à une faillite complète ; à ce titre il est tout naturel que l’empereur Guillaume, au coup d’œil profond duquel rien n’échappe, s’en préoccupe et s’en inquiète, mais ce qui, en aucun cas, ne court le moindre danger, c’est l’empire lui-même. L’Allemagne impériale peut devenir le théâtre d’expériences sociales hardies et compliquées, elle ne saurait être la proie d’une révolution. Il convient qu’en France on se rende un peu mieux compte de ces choses et qu’on considère la vague « socialiste » qui vient de déferler comme une vague nationaliste n’ayant aucun rapport avec celle que M. Jaurès ou M. Viviani voudraient mettre en branle. Ces messieurs parlent comme la colombe de l’Arche et entrevoient un désarmement général et une paix perpétuelle. Leurs collègues Allemands avec lesquels ils n’ont pas deux idées communes, ont un tout autre idéal ; et pour comprendre à leur façon l’organisation de l’empire, ils n’en sont pas moins de bons serviteurs de l’empereur.

Crises Ministérielles.

Il est amusant de voir la République Française devenue le pays de la stabilité ministérielle ; le temps n’est pas si loin où nous usions deux cabinets par an et où nos voisins nous faisaient l’amitié de se moquer de nous à ce propos. La Hongrie, la Grèce, l’Italie et l’Espagne ont dansé ces temps-ci le Cake-Walk gouvernemental. En Hongrie M. de Szell s’est retiré ; le fils de feu le fameux Tisza a tenté de former un cabinet et n’y a pas réussi ; le

  1. Voir la Revue de Septembre 1902.