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REVUE DU PAYS DE CAUX

responsable d’une pareille énormité. Mais M. Metchnikoff ne s’arrête pas en route ; l’image de Mathusalem l’obsède. Il nous promet des existences superposées, une jeunesse qui ira jusqu’aux environs de cent ans et un âge mûr qui prendra fin aux environs de deux cents. Que de choses on pourra faire avec tant d’heures devant soi ! Par exemple, il sera très malaisé pour un auteur fécond qui aura débuté jeune (vers 75 ans) dans la carrière des lettres, de se rappeler, au seuil de la vieillesse, le contenu des 8 ou 10.000 chapitres que sa plume aura confectionnés sans se presser. Mais l’inconvénient est faible.

De vieillesse, d’ailleurs, il n’y aura plus. La vieillesse est encore une anomalie inacceptable. Pourquoi vieillir ? Mourir, c’est une autre chose. Oui, il faut mourir, mais « rassasié d’années », comme les patriarches de la Bible. Et alors la crainte de la mort n’existera plus. On aura autant d’agrément à s’endormir du sommeil éternel qu’on en éprouve chaque soir à s’endormir dans son lit après une journée de fatigue. Nous croyons que tout le livre de M. Metchnikoff est écrit en vue de cette petite théorie anticléricale, car on entend bien que ce sont les Églises qui, d’après lui, ont institué cette crainte de la mort avec leurs récits d’enfers et de purgatoires. Laissez faire la nature en la préservant seulement du microbe et tout cela s’évanouit… Mais, brave docteur, ne sentez-vous pas que ce qui fait l’agrément du sommeil de chaque soir, c’est la confiance de se réveiller le lendemain matin ? Si vous avez un doute sérieux à cet égard, vous n’aurez aucun plaisir à vous endormir, cela est bien certain. Aussi meurt-on d’autant plus facilement, à quelque âge que ce soit, que l’on a foi dans le réveil éternel. C’est encore l’unique recette.

Les marins dont Jean de Pontevès décrit les héroïques aventures, n’en avaient point d’autres. On sait ce que fut cette colonne Seymour qui quitta Tien-Tsin le 14 juin 1900 et y rentra le 22 décimée, n’ayant pu parvenir jusqu’à Pékin et ayant soutenu dans les ruines d’un arsenal Chinois un siège extraordinaire. Les escadres de huit nations en avaient fourni le contingent et l’amiral Anglais Seymour en exerçait le commandement. C’est lui qui à l’issue d’un assaut dans lequel nos troupes avaient joué le beau rôle et pris la première place, dit au capitaine de vaisseau de