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UN PASSÉ COMPLIQUÉ

l’abominable et absurde attentat qui le porta au trône n’était point fait pour le rendre sympathique aux réformes libérales ; il fut, pourtant, libéral à sa manière, ou plutôt à la manière de son pays ; son fils s’efforce à l’imiter ; mais la tâche est maintenant singulièrement ardue et des nuées montent sur l’horizon…


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L’IMPASSE RUSSE



Le récent manifeste, par lequel l’empereur Nicolas ii s’est adressé à ses sujets, respire à chaque ligne la bonne volonté et l’impuissance. On y devine un désir franc et une résolution ondoyante. L’affirmation du désir est le fait du tsar et l’honore ; l’hésitation à rien décider est le fait des circonstances et l’excuse.

C’est qu’en effet le gouvernement Russe se trouve aujourd’hui au fond d’une impasse et voici quelle est cette impasse. Déjà chef d’un état immense et d’une confession nombreuse, le tsar est devenu en outre chef d’une banque colossale et d’une énorme maison de commerce. Or dans l’exécution de ces devoirs écrasants et multiples, il n’a personne pour l’aider ; il est seul. Nul souverain, nul gouvernement ne se trouva jamais en face d’une situation plus difficile.


L’enrichissement forcé

La configuration de la Russie, son histoire, sa philosophie nationale, ses caractéristiques ethniques, tout devait la pousser dans la voie du progrès matériel : vastes étendues plates sur lesquelles il suffisait de poser des chemins de fer, débouchés maritimes vers lesquels l’effort collectif devait forcément tendre, production abondante de céréales, main-d’œuvre à bon marché et surtout nécessité, pour les dirigeants, de capter et d’endiguer les aspirations naissantes d’un peuple s’éveillant à l’intelligence de ses intérêts. Ce vaste domaine d’ailleurs s’ouvrait aux capitaux Européens à l’heure où ceux-ci commençaient à trouver certaines difficultés pour s’employer fructueusement dans les vieux pays,