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REVUE DU PAYS DE CAUX

QUESTIONS PÉDAGOGIQUES



Au moment où notre Collège de Normandie, sur lequel tant d’espérances sont fondées, se prépare à ouvrir ses portes, il n’est pas sans intérêt de donner quelque attention aux grands courants de réforme pédagogique qui se sont récemment dessinés ou accentués en France.

Nous ne nous attarderons pas à analyser le cas du professeur Hervé, cas lamentable, moins par l’aberration mentale qu’il a révélée chez cet universitaire que par les défauts de jugement bien plus incompréhensibles qui se sont manifestés, à cette occasion, dans une partie de l’opinion. Comme M. Millerand l’a fait observer récemment avec autant de bon-sens, que d’à-propos, il ne suffit pas que l’éducateur ait des destinées de l’humanité un idéal certain, il faut encore qu’il possède la notion du « point précis » de l’histoire auquel son pays se trouve parvenu. En admettant même qu’un jour puisse luire où par l’évolution des idées et des mœurs, le sentiment de la patrie et le culte du drapeau doivent cesser d’être la base de l’éducation civique, ce jour n’est pas venu ; et il est de toute évidence qu’un homme qui traite le drapeau tricolore de « torchon à planter dans le fumier » et les soldats tués à Madagascar « d’escarpes et de voleurs morts dans l’exercice de leur profession », il est évident que cet homme là n’est point fait pour enseigner à des jeunes Français de 1902. Il faut être un peu timbré ou un peu ramolli pour ne point le comprendre.

Mais des questions plus sérieuses ont occupé le Parlement. D’accord avec la grande commission qui a mené l’enquête sur les réformes à introduire dans l’enseignement secondaire, le ministre de l’Instruction Publique a pris une série de mesures très importantes. Le lycée désormais jouira d’une certaine autonomie ; on n’aura plus besoin de demander la permission du recteur de l’académie ou du ministre pour enfoncer trois clous dans un mur ou pour abattre une cloison vermoulue. Que de temps il a fallu pour en arriver à cette réforme si simple ! L’émancipation du proviseur était pour ainsi dire la clef de voûte du progrès ; rien n’était possible tant qu’on ne l’avait point réalisée. Un établissement