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L’ÉVOLUTION DE LA DÉMOCRATIE

L’ÉVOLUTION DE LA DÉMOCRATIE



Il advient que de grands fleuves — la Seine, aux environs de Paris par exemple, — forment des boucles compliquées dont la raison géographique, pour certaine qu’elle soit, n’apparaît pas aux regards de l’homme. Pareils revirements se produisent dans le cours des événements : la cause en demeure sinon invisible, du moins malaisée à percevoir et les contemporains éprouvent de la surprise en notant le démenti donné par les faits à leurs pronostics les plus raisonnables.

Jusqu’ici, en regardant couler le fleuve Démocratie, nous jugions non sans raison que si, d’aventure, quelques barrages résistants surgissaient çà et là pour retarder et accidenter ses flots, ceux-ci n’en continueraient pas moins d’aller, balayant les privilèges et égalisant l’humanité, vers le gouvernement populaire par le nombre et l’élection. C’était très probable — et pourtant, ce n’était pas vrai : l’évolution du pouvoir démocratique s’accomplit tout au rebours de ce que nous avions prévu ; nous sommes à un tournant du fleuve : il a fait un coude brusque et paraît remonter vers sa source. Ayons la franchise de le constater.


Qu’est-ce qu’une démocratie ?

Une démocratie n’est point nécessairement une république ; ce serait en ramener la définition à celle d’une simple forme gouvernementale que de les confondre : une démocratie est, à proprement parler, un pays dans lequel prévaut la volonté nationale, c’est-à-dire dans lequel la majorité a organisé le gouvernement de son choix et participe à ce gouvernement soit directement, soit indirectement. L’inverse de la démocratie, ce n’est point la monarchie, c’est l’aristocratie, le régime dans lequel domine une minorité privilégiée. De sorte qu’une république peut être aristocratique et une démocratie monarchique. La république de Venise dans le passé, la monarchie Norvégienne dans le présent en sont de frap-