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à toucher le cœur du dieu, du même coup, il gagnera le cœur du héros, que Gilgamès ne songera plus dès lors à faire une telle équipée.

Arrivé en présence du dieu Samas, Eabani, d’abord, fit brûler de l’encens et répandit une libation en son honneur ; puis, la droite levée, dans l’attitude des suppliants, il lui adressa, du fond de l’âme, une prière ardente... Maintenant, de sa poitrine oppressée, s’échappait un flux de paroles, — comme une vive récrimination étouffée sous les larmes — : « Pourquoi donc, ô Samas, pourquoi as-tu mis au cœur de Gilgamès une rage inassouvie ? Voici que tu l’as à peine touché [1], aussitôt, il entreprend une lointaine expédition, vite, il se précipite à la rencontre de Humbaba. L’insensé ! il vole au combat en aveugle, il se jette à l’aventure en des sentiers inconnus... Et il n’aura ni repos ni cesse qu’il n’ait mené à bonne On cette campagne. Il veut à tout prix atteindre la forêt de cèdres, fouler aux pieds Humbaba, son puissant ennemi, enfin, extirper le mal, objet de ta haine, ô Samas [2]... »

La prière d’Eabani resta sans effet. Samas se montra inflexible ; Gilgamès persista dans ses intentions hostiles...

La guerre une fois résolue, aussitôt, commencèrent les préparatifs. A l’appel de Gilgamès, tout le pays d’Uruk se leva comme un seul homme. Grand était l’émoi dans la ville et ses alentours. De tous côtés, on voyait accourir et s’équiper les hommes d’armes.

  1. Il s’agit ici d’un attouchement mystérieux possédant je ne sais quelle vertu magique.
  2. Tab. IV, Col. II, l. 7-18. — Ce qui a été dit, au paragraphe précédent, des relations étroites qui unissaient Samas et Gilgamès résulte du rapprochement de ce passage avec l’Hymne à Gilgamès (Voir l’Appendice).