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COMMENT S’EST FORMÉ L’UNIVERS.

des dogmes nécessaires, reste-t-il humain dans l’expression, c’est-à-dire dans l’accessoire, dans ce qui ne tend pas directement à la fin surnaturelle de l’homme. Il se maintient constamment dans le domaine des idées générales, — et il fallait qu’il en fût ainsi pour que notre liberté intellectuelle ne fût pas amoindrie ; il ne dit pas toujours toute la vérité ; mais il ne dit jamais rien qui ne soit exact et vrai. Il n’a ni pu ni voulu dire faux. Le faux, c’est nous qui le lui avons fait dire, nous de son récit lecteurs ou interprètes ignorants, qui avons inexactement apprécié la parole humaine, imparfaite ou mal traduite. Nous avons voulu juger d’une langue éminemment figurée, pittoresque, faite pour parler à l’imagination et aux sens, comme tous les idiomes de l’Orient, avec le génie de nos langues occidentales, correctes, précises, sobres d’images et où l’imagination ne joue qu’un rôle secondaire et effacé. Et les prétendues erreurs de Moïse dans la Genèse ne sont que nos propres fautes de grammaire et de philologie.

Ou bien encore le sens donné, en diverses époques, à certaines expressions des saintes Écritures, a dépendu de l’idée qu’on se faisait alors des phénomènes naturels, et de l’état peu avancé, par rapport à nous, des sciences cosmologiques. Bien des hommes religieux se figurent ainsi défendre la révélation, alors qu’ils ne défendent que leur interprétation propre, laquelle provient sans qu’ils s’en doutent, d’une simple opinion de commentateur qu’ils prennent pour une vérité démontrée ou définie. Or le progrès des sciences peut amener une interprétation de certains passages des livres sacrés différente des interprétations précédentes, sans, pour cela, ébranler en rien l’autorité de la sainte Écriture. Il ne faut pas négliger d’observer que les versions de la Bible, adoptées par l’Église n’ont été vérifiées et par suite approuvées, qu’au point de vue dogmatique. Il n’est pas contesté aujourd’hui que la Vulgate de saint Jérôme, cette version en quelque sorte officielle pour l’Église latine et dogmatiquement irréprochable par conséquent, laisse à désirer sous le rapport philologique.