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de la Praguerie, remarque M. Vallet, venait d’y éclater. Des combats isolés, le pillage, la rapine offraient à l’héroïne une spéculation facile et digne d’elle ; elle joua tout au plus le rôle d’un chef de bande, comme l’écuyer gascon qui lui fut substitué et que le dauphin Louis fut obligé d’emprisonner au château de Montaigu 35. Le fait même de son remplacement par un pareil condottiere témoignerait peu en sa faveur ; mais s’être trouvée en relations avec un scélérat comme le maréchal de Rais, avoir partagé peut-être un moment ses bonnes grâces et tenu de lui un emploi quelconque (ce qui est assez vraisemblable si l’on se souvient qu’elle s’était mêlée de magie à Cologne, et que cet homme infâme faisait venir des régions lointaines tous les nécromanciens dont il entendait parler), ce sont là des circonstances aggravantes, propres à jeter sûr elle une lueur presque sinistre.

Quant à la date de ces exploits, on voit que la lettre de rémission ne précise rien et m’autorise à les rejeter après le séjour de la dame des Armoises à Orléans et en Touraine, ce qui forme un itinéraire bien plus naturel, à une époque où les voyages n’étaient ni rapides, ni commodes. Jeanne ne prit point part non plus à l’expédition (totalement ignorée du reste) entreprise par Gilles de Rais contre Le Mans. Les textes qui font mention d’une Pucelle du Mans ont rapport à une autre femme, Jeanne la Féronne, magicienne qui fit aussi beaucoup de dupes et finit par être condamnée au pilori par son évêque. Celle-là ne se donnait pas pour l’héroïne d’Orléans, mais se prétendait simplement inspirée comme elle, et ne paraît pas avoir porté les armes. Elle surgit, d’ailleurs, vingt ans plus tard 36.

C’est ici qu’il faudrait placer, si elle était authentique, une opération militaire plus importante conduite par Jeanne des Armoises, et qui aurait eu pour résultat de rendre aux Français la possession de La Rochelle. Un biographe espagnol