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CLÉMENT V
PHILIPPE LE BEL ET LES TEMPLIERS


I


On aurait de la peine à trouver, dans toute l’histoire de France, un événement dont les causes soient moins connues et dont le caractère soit plus diversement apprécié que la condamnation des Templiers sous Philippe le Bel. La suppression d’un ordre militaire et religieux aussi puissant est en soi une chose grave, et les violences qui l’accompagnèrent donnent fort à réfléchir. L’accord de la puissance temporelle et du pouvoir séculier, de l’Église et de la royauté, fut nécessaire, mais cet accord fut long à s’établir, et peut-être n’a-t-il pas été bien sincère. Les chevaliers du Temple étaient-ils coupables ? Quels motifs ont pu pousser le roi de France à provoquer leur destruction ? Quelles raisons ont pu déterminer le Saint-Siège à prononcer leur abolition ? Ce sont là des problèmes dont l’examen a sa place marquée dans la Revue des questions historiques.

Tout d’abord, il convient de restreindre le nombre des points sur lesquels doit porter la discussion. La culpabilité des Templiers forme, à elle seule, une question qui mérite et même exige une étude spéciale ; aussi la réserverons-nous et l’ajournerons-nous. Bornons-nous pour l’instant à rechercher pourquoi Philippe le Bel poursuivit la suppression du Temple, et par quels moyens il l’obtint du Pape ; car, disons-le tout de suite, il y eut, d’une part, obsession ardente et persévérante ; d’autre part, résistance ferme et prolongée, qui finit pourtant