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fois arrivée, assez désappointée dans ses espérances, et fait le récit de ses mécomptes de la manière du monde la plus vive et la plus piquante. Ce livre amusant, qui nous paraît écrit dans le but de faire prévaloir l’opinion des torys, prouve-t-il que l’Amérique a un détestable gouvernement ? Fait-il la satire des institutions républicaines des États-Unis ? Peut-il devenir un livre de parti et plaider pour la monarchie contre la république ? On a paru le croire : de là l’accueil différent qu’il a reçu, blâmé, vanté, selon les diverses opinions. Quoi qu’il en soit, et nonobstant le grand nombre d’idées fausses, et les exagérations peu bienveillantes de l’auteur, on trouve dans son livre des détails fort intéressants sur le caractère des Anglo-Américains, et sur les immenses travaux exécutés dans cette partie du nouveau monde. Nulle part peut-être les travaux n’ont été si audacieux, si rapides, si gigantesques ; nulle part la nature n’a été si impérieusement maîtrisée. Mistress Trolloppe n’est pas suspecte quand elle admire la grandeur de ces travaux. Eh ! qui n’admirerait ces canaux qui se croisent et s’entrelacent de toutes parts, qui prennent et qui unissent, comme par la main, les mille fleuves de l’Amérique, qui joignent l’Atlantique aux grands lacs, à ces cinq Méditerranées qui s’ouvrent l’une dans l’autre, et qui, par les rivières qu’elles reçoivent ou qu’elles envoient, touchent en même temps à tous les points de ce vaste continent, merveilleux réseau de navigation qui couvre l’Amérique. C’est dans cet océan divisé en mille bras que s’élancent les bâtiments à vapeur qui portent des peuples impatients de descendre sur de nouveaux rivages ; et, à peine descendus, les forêts tombent, les maisons s’élèvent, les manufactures s’établissent. C’est une ardeur, c’est un mouvement que mistress Trolloppe peint admirablement, quoique avec des paroles satiriques.

Nous connaissons encore de mistress Trolloppe : La Belgique et l’Ouest de l’Allemagne, 2 vol. in-8, 1834.

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URFÉ (Honoré), né à Marseille en 1567, mort en 1625.


L’ASTRÉE. — Cette pastorale est, dit-on, le tableau des intrigues de la cour de Henri IV. Aussi ses bergers sont-ils plus polis que ceux des Églogues de Virgile ; ils le sont même trop ; et l’Astrée, dit Fontenelle, n’est pas moins fabuleuse par la politesse et les agréments de ses bergers, que nos vieux romans le peuvent être par leurs enchanteurs, par leurs fées, et par leurs aventures bizarres et extravagantes. Il y a pourtant des choses dans l’ouvrage d’Urfé, qui sont dans la perfection du genre pastoral ; mais comment soutenir jusqu’au bout la lecture d’une pastorale en cinq énormes volumes.