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chemin. Bénédict et Valentine sont bientôt épris l’un de l’autre, et Louise elle-même nourrit pour ce jeune homme une passion qui s’allume au contact de celle de sa sœur. La passion de Bénédict et de Valentine est arrivée au comble, lorsque Valentine est forcée d’épouser un diplomate, M. de Lansac. Dans la nuit de ce mariage, Bénédict se fracasse le crâne d’un coup de pistolet et survit à sa blessure. À cette nouvelle Valentine tombe malade, et son mari part pour remplir une mission à Saint-Pétersbourg. Pendant son absence, le château ouvre tous les jours ses plus mystérieux asiles à Louise, à Valentine et à Bénédict. Valentine n’est pas encore coupable, lorsque M. de Lansac reparaît ; elle est pure, mais elle est compromise, et Lansac le sait. Une nuit, il rôde autour d’un pavillon où Bénédict est venu seul trouver Valentine malgré elle. Lansac s’approche en ayant soin de se faire entendre, pour donner à Bénédict le temps de se cacher derrière une glace portative dans l’angle de l’appartement. Alors commence entre lui et sa femme une des scènes les plus dramatiques du roman, à la suite de laquelle Lansac obtient de Valentine une signature qui lui servira, au prix de leur ruine commune, à satisfaire des créanciers qui perdent patience. Cette négociation terminée, Lansac se retire. Le mot de Valentine après le départ de son mari, « Soyez tranquille, » est sublime. Cette femme comprend que son amour pour Bénédict lui défend d’appartenir jamais à Lansac, qu’il faut choisir entre eux pour échapper à la prostitution. La nuit qui décide le sort de Valentine et de Bénédict est à coup sûr une création admirable. Quand Valentine, entre le sommeil et le délire, prodigue à Bénédict des baisers et des caresses qu’elle croit légitimes ; quand elle écarte elle-même, d’une main impatiente, les voiles que son amant généreux avait mis entre sa faiblesse et le danger de sa beauté ; lorsque sa bouche, traduisant une à une les illusions de son rêve, révèle à Bénédict la réalité de son bonheur, qu’elle attire sur son sein, comme un époux aimé à qui elle ne doit rien refuser, l’homme qui ne peut la posséder sans crime, on cède à l’irrésistible émotion de la vérité.

INDIANA, in-8, 1832. — Ce livre est un long cri de colère contre la société, et surtout contre le mariage ; c’est un roman né sous l’influence de ces idées de vague mécontentement et de vœux indéterminés, idées auxquelles il n’est pas une imagination de notre temps qui ne soit prise au moins une fois dans les inextricables lassitudes de la jeunesse. — Indiana est une jeune créole de l’île de Bourbon, frêle, pâle, triste jusqu’à la mort, parce qu’elle n’a pas rencontré l’homme de ses songes, le seul être qu’elle doive aimer. Élevée au désert, négligée par son père, vivant au milieu des esclaves, elle s’était habituée à dire : « Un