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SAINTINE (Xavier Boniface), né à Paris le 10 juillet 1797.


JONATHAN LE VISIONNAIRE, contes philosophiques et moraux, 2 vol. in-12, 1825. — Jonathan est un personnage mystérieux, qui parle toutes les langues, qui sait tout ce qui s’est passé aux époques les plus reculées de notre monde, et qui a été le contemporain de tous les événements qu’il raconte. Voyageant de contrée en contrée, de climat en climat, ne se fixant nulle part, il a tout vu, connaît tout, c’est le frère aîné du Juif errant. — Les récits de Jonathan, qui contiennent chacun une action distincte, justifient très-bien le nom de Contes philosophiques et moraux que leur a donné l’auteur ; tous renferment une pensée ingénieuse et philosophique, une moralité piquante, habilement développée. La scène se passe en divers pays : tantôt, comme dans le Pêcheur d’Ormus, le conteur nous montre, dans une fiction remplie de détails charmants, combien les dons de la fortune sont insuffisants pour le bonheur ; ailleurs, c’est l’orgueil de la science qui égare un malheureux savant, méconnaissant que c’est pour notre bonheur que Dieu a donné des bornes à nos sens. — « Nous ne vivons jamais, nous attendons la vie, » a dit Pascal, et après lui Dryden. Cette vérité est mise en action dans le Jeune Boyard. Le héros du conte a vingt-cinq ans ; il se plaint amèrement de la brièveté de la vie ; selon lui, c’est une contradiction révoltante que de n’avoir donné à l’homme, au roi de la création, qu’un règne de si peu de durée. Un être surnaturel entend ses plaintes et lui permet de disposer de deux siècles d’existence. Bien plus, l’avenir est à sa disposition : dès qu’il forme un désir, il est le maître d’anéantir le temps qui le sépare de l’époque où ce désir doit être accompli. Enfin, il a le droit de vieillir aussi vite qu’il le veut, et il se promet bien de ne pas user de ce droit. Mais les situations variées dans lesquelles il se trouve, lui font oublier ce qu’il s’est promis à lui-même. L’âge mûr et la caducité arrivent pour lui presque en même temps. Heureusement, comme l’abbé du docteur Badajoz, il n’avait fait qu’un rêve. — On trouve des tableaux plus doux et plus riants dans plusieurs autres contes : l’un d’eux a fourni le sujet du charmant vaudeville de Julien ou Vingt-cinq ans d’entr’acte.

UNE MAÎTRESSE DE LOUIS XIII, 2 vol. in-8, 1834-35. — Louis XIII a vu à côté de Mlle  de la Fayette, dans le couvent de la Visitation, Mlle  de la Porte, jeune pensionnaire, fille d’un proscrit, vierge à la beauté d’ange, plus éclatante encore par le contraste de l’ancienne favorite, qu’écrasent alors son béguin de nonne, et ses regrets d’amante. Louis XIII devient amoureux, mais il n’est pas le seul. Chargé de peindre une Assomption pour le couvent, Lesueur