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mense recueil de plus de quatre cents histoires, presque toutes vraies au fond, offre une variété de sujets bien remarquables. De même que dans les Provinciales et dans les Nuits de Paris, Restif a eu l’impudence de joindre, à des noms obscurs et méprisables, ceux de plusieurs femmes que des erreurs de jeunesse n’empêchaient pas d’être estimables, et dont quelques-unes moururent de chagrin d’avoir vu révéler des fautes qu’elles avaient d’ailleurs expiées par un long repentir, et une conduite à l’abri de tout reproche. — La lecture de ce recueil est en général très-amusante ; tous les goûts trouvent à s’y contenter, tous les genres s’y rencontrent : le terrible, le tendre, le galant, le naïf, le bizarre, etc. Un grand nombre de nouvelles sont délicieuses par le charme des détails ; c’est là que les classes inférieures de la nation sont peintes de main de maître ; c’est une partie dans laquelle l’auteur excellait. On pourrait extraire des quarante-deux volumes qui composent ce recueil, une demi-douzaine de volumes fort intéressants ; ce serait un bon moyen de tirer parti de cet immense répertoire, où trop souvent le cynisme semble le disputer au mauvais goût, et attira à l’auteur de vifs reproches. Voici comment il y répondait : « Si la science est respectable, la fausse délicatesse ne l’est pas. Les Contemporaines sont un ouvrage de médecine morale. Si les détails en sont licencieux, les principes en sont honnêtes et le but en est utile. Qu’est-ce qu’un romancier ? Le peintre des mœurs ; les mœurs sont corrompues : devais-je peindre les mœurs de l’Astrée ? Réservez, femmes honnêtes, réservez votre indignation pour cette indécence de société, qui n’est bonne à rien ; pour ces équivoques infâmes, pour ces manières libres, pour ces propos libertins qu’on se permet tous les jours avec vous et devant vos filles. Mais pour la prétendue indécence qui a un but qui est moral, qui sert à instruire et à corriger, n’en faites pas un crime à l’écrivain qui a le courage de vous présenter le miroir du vice pour vous en faire voir la difformité. »

*LA DÉCOUVERTE AUSTRALE, ou les Antipodes, 4 vol. in-12, 1781. — C’est un roman imité des Voyages de Gulliver et de l’Île inconnue, dont l’idée principale est bizarre. L’auteur veut que l’homme ne soit que la perfection de chaque espèce d’animaux, que par suite nos vertus et nos vices proviennent des appétits de nos pères primitifs ; ainsi, la colère était descendue du lion, la férocité du tigre, la bonté du mouton, la faculté de ramper du reptile, etc. Restif pourrait avoir plus raison que nous ne le pensons peut-être ; il est impossible, en effet, que certains hommes de nos jours ne descendent pas en principe de quelques méchantes bêtes.

*LA VIE DE MON PÈRE, 2 vol. in-12, 1778. — Ce roman est