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plus immondes, en gardant son âme pure pour un avenir meilleur. Il y passa sans s’y infecter, comme un filet d’eau qui court dans une mare. Le fait était contre lui, sans doute ; mais que d’excuses, que de palliatifs dans cette existence nomade et tourmentée, dans ces revers de famille, dans cette position fausse et indigente ! Qui de nous oserait se dire assez fort pour souffrir autant que lui et rester vertueux ! Pâtre à Fontainebleau et dans la Bourgogne, saisi à Chantilly comme vagabond, longtemps détenu dans une maison de correction, chassé par une mère, repoussé de toutes parts comme libéré, quel homme, mourant de faim et de soif, avant l’âge où une énergie faite porte à préférer le suicide à la honte, quel homme pourrait répondre de toutes ses impressions, de toutes ses passions, de tous ses besoins, au point de dire : « Je ne serai point coupable. » S’il en est qui se sentent cette présomption dans leur force et dans leur vertu, qu’ils jettent à Raynal la première pierre. Hippolyte Raynal était à Poissy quand une idée l’illumina : cette idée devait le sauver. Il écrivit à Béranger en lui envoyant quelques poésies. On sait ce que peut sur Béranger une bonne œuvre à faire. Béranger lut ses vers, lui répondit, l’encouragea, et vint en cour d’assises parler avec intérêt du jeune poëte et de ses malheurs ; d’autres amitiés vinrent se mettre à côté de celle de l’illustre poëte. On obligea Raynal avec une noblesse, un empressement, qui finirent par désarmer ses haines contre les hommes. Aujourd’hui Raynal est libre ; il est écrivain. Son livre c’est sa vie : sa vie qu’il a révélée tout entière, minutieusement, de bonne foi. Jamais révélations n’allèrent plus avant dans ces plaies sociales que nul ne peut décrire s’il n’en a subi la contamination personnelle ; jamais on ne connut mieux ces existences d’exception, qui n’ont trouvé jusqu’ici d’autres réponses aux injustices de la loi, que la persistance dans le crime. Raynal seul avait à nous livrer de pareilles confessions. Il l’a fait avec courage, avec mesure, avec dignité, avec talent.

On a encore de cet auteur : Sous les Verroux, in-8, 1836.

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REEVE (mistress Clara),
romancière anglaise, née à Ipswich en 1725, morte le 8 décembre 1803.


LE VIEUX BARON ANGLAIS, ou les Revenants vengés, trad. par de la Place, in-12, 1797. — Le vieux baron anglais est un enfant littéraire du château d’Otrante, pour la composition duquel l’auteur a eu recours aux ressorts surnaturels employés par Horace Walpole, mais dans un cadre plus borné. Miss Reeve n’a pas