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celui de conter si simplement que les traits piquants ressortent d’eux-mêmes, sans qu’il paraisse que l’auteur ait songé à être ingénieux, plaisant, épigrammatique. Dans cet art, peu d’écrivains ont égalé Rabelais ; aucun ne l’a surpassé.

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RADCLIFFE (Anne Ward, dame),
née à Londres le 9 juillet 1764, morte le 7 février 1822.


Douée d’une imagination aussi sombre que féconde, mistress Radcliffe avait parcouru plusieurs contrées de l’Europe, voyagé dans la Hollande, sur les lacs pittoresques du comté de Westmoreland, sur les bords du Rhin, et les souvenirs de ces lieux divers avaient rempli son âme des idées les plus romanesques ; de là ces descriptions brillantes dont elle embellit ses compositions.

LES CHÂTEAUX D’ATHLIN ET DE DUNBAYNE, 2 vol. in-12, 1819 (l’original est de 1789). — La scène de ce roman se passe en Écosse, dans les siècles d’ignorance ; mais on n’y remarque rien qui puisse donner une idée des mœurs et de l’aspect particulier du pays.

JULIA, ou les Souterrains du château de Mazzini, trad. par Moyln, 2 vol. in-12, 1798 (l’original, publié en 1790, est intitulé : The Sicilian). — On trouve dans ce roman le luxe et la fécondité d’imagination qui étaient le caractère distinctif des compositions de l’auteur. Des aventures sans nombre, qui se succèdent rapidement, avec tous les changements d’un danger évité au moment où il paraît inévitable, entraînent le lecteur ; et les riches tableaux et les descriptions qui relèvent l’action sont celles d’un conte oriental. — Le Sicilien fit assez de sensation parmi les lecteurs de romans, au temps où il parut ; dans le fait, mistress Radcliffe peut réclamer le mérite d’avoir été la première à introduire dans ses fictions en prose un style descriptif animé et un récit touchant, qui jusqu’alors n’avaient été d’usage que dans la poésie.

LES MYSTÈRES D’UDOLPHE, trad. par Mlle  V. de Chastenay, 4 vol. in-12, 1797. — Le manuscrit de ce roman, dont le titre seul fut un charme, fut payé par le libraire cinq cents livres sterling. Le public le dévora dès son apparition ; dans les familles nombreuses, on se passait de l’un à l’autre les volumes, on se les arrachait de main en main, et les plaintes portées contre ceux dont les occupations étaient ainsi interrompues, étaient un tribut général payé au talent de l’auteur. La situation, les malheurs de l’héroïne donnent à ce roman la physionomie de celle du Roman de la Forêt ; mais cette ressemblance est celle que l’on aime à trouver dans les tableaux du même peintre, destinés à faire le pendant l’un de