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oubliée chez le schériff ; par hasard encore celui-ci a laissé échapper le montagnard, qui s’est mis à la tête d’une nouvelle bande d’insurgés. M. Sackville partit avec le perfide Galbraith pour aller chercher cette grâce. Arrivés entre un four à chaux et les ruines de l’abbaye de Kildailly, Galbraith voit tout à coup paraître devant lui Shane Sullivan, pauvre hère qu’il a poursuivi, torturé, auquel il n’a laissé aucun abri pour reposer sa tête, qui a vu sa femme chassée de sa cabane mourir de froid et de faim sur la grande route. Sullivan demande à Galbraith compte de ses malheurs, en lui montrant au bout de son mousquet sa fosse qu’il a creusée d’avance. M. Sackville essaie de rappeler Sullivan à des sentiments moins désespérés, lorsque Galbraith tire tout à coup un pistolet, et frappe l’Irlandais qui tombe en maudissant le traître. Au bruit du pistolet, une troupe d’hommes s’élance des ruines ; le chef demande à Sullivan quel est son meurtrier ; Sullivan, avec un effort convulsif, nomme Galbraith, et Galbraith est à l’instant massacré. M. Sackville est entraîné au milieu du cloître de la vieille abbaye de Kildailly, devant un autel en forme de tombe, qu’éclairait un rayon de lumière. Brian, le chef des montagnards, en le poussant vers cet autel sur lequel le sang de Thims Renold, son dénonciateur, est encore fumant, ne lui donne, pour y mourir lui-même, que le temps d’adresser à Dieu une dernière prière, attendu qu’il avait promis de lui obtenir sa grâce, et l’a ainsi détourné de se sauver, quand l’heure suprême était arrivée, quand le gibet était préparé, et qu’on n’attendait plus que le signal du bourreau. À cette accusation, le jeune Anglais répond en tirant de son sein la lettre de grâce, si perfidement retenue chez le shériff, et pour laquelle il vient d’exposer sa vie ; il y joint un paquet adressé par lady Sackville, qui contient les fonds nécessaires pour passer en Amérique. Brian lit la lettre de grâce, presse Sackville dans ses bras, lui indique le chemin du manoir, et part pour rejoindre les siens. Deux ans après, lady Sackville et son mari lurent dans les journaux du matin l’histoire du procès et de l’exécution de Brian ! — Le Manoir de Sackville n’est pas un traité, pas un pamphlet, par une histoire, pas un drame non plus, mais peut-être tout cela ensemble ; c’est l’effrayant tableau d’un peuple arrivé à une de ces époques de crise sociale où tout semble sortir du chaos ou prêt à y entrer.

LA PRINCESSE, trad. par Mlle Sobry, 3 vol. in-12, 1834. — La Princesse est un roman où lady Morgan dévoile tous les vices, tous les travers de l’aristocratie anglaise. Tout ce qu’il y a de niaiserie titrée dans les cercles élégants de Londres pose tour à tour devant l’impitoyable peintre. Ici, c’est un noble lord qui, pour conserver aux pieds de la danseuse qu’il protége toute leur finesse,