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été trop lu pour qu’il soit besoin d’en faire l’analyse : Caroline, Walstein, Lindorf et Mathilde sont connus et aimés de tout le monde ; on ne peut lire leur histoire sans éprouver les plus vives et les plus douces émotions. — Nous remarquerons toutefois que ce roman commence comme les autres finissent, par le mariage de l’héroïne ; il n’est pas moins bizarre que ce qui ramène Caroline à un époux pour lequel elle conçoit d’abord une aversion très-vive, soit une grande passion pour le meilleur ami de son mari ; mais cette singularité ne nuit ni à la vraisemblance ni à l’intérêt. L’auteur a peint d’une manière charmante le développement de la sensibilité de son héroïne. Cette jeune fille, d’abord si légère, si insouciante, devient bientôt la femme la plus intéressante, la plus courageuse et la plus sensible. Quelle aimable ignorance dans ses premiers jugements ! Son père lui parle du comte de Walenstein, et lui apprend qu’il est le favori du roi ; dès lors Caroline le croit charmant ; ce mot de favori lui donne des idées les plus riantes ; elle se rappelle son oiseau favori, son chien favori, son mouton favori, donc le favori d’un roi devait nécessairement être le plus beau de son espèce. Mais toutes ses idées changèrent dès qu’elle eut vu le comte ; il lui paraît un monstre ; elle s’étonne du singulier goût des rois dans le choix de leurs favoris, et proteste que si elle était reine, le comte de Walenstein ne serait pas le sien. Il le devint pourtant, et elle aima passionnément ce monstre.

DOUZE NOUVELLES, 4 vol. in-12, Genève et Paris, 1812. — Ce recueil contient les nouvelles suivantes : Sophie ou l’Aveugle (imitée de Starke, mais dont la suite est originale) ; Eliza et Albert ; le petit Antoine (imitée de Starke) ; Deux visites (l’une imitée de Starke et l’autre originale) ; le Vieux savetier (imité de Starke) ; le Songe (imité de Musæus) ; le Vieux célibataire ; l’Avalanche (imitée de l’allemand) ; le Rosier et le Mouton (imité de l’allemand). Cette dernière nouvelle est sans contredit la plus intéressante de la collection ; nous allons essayer d’en offrir quelques traits dans une rapide analyse. Un professeur de philosophie était éperdument amoureux d’une jeune demoiselle, et les yeux d’Amélie lui avaient répondu assez favorablement. Il avait découvert qu’Amélie, qui aimait beaucoup les fleurs, désirait depuis longtemps d’offrir, le 1er  janvier, un beau rosier fleuri à sa mère, mais qu’elle n’avait pu réussir à en élever un. Le professeur saisit avec ardeur ce moyen de faire sa cour ; il achète plusieurs rosiers, et parvient, après avoir vu périr tous les autres, à en élever un seul, qui, vers la fin de décembre se couvre de boutons. La veille du jour de l’an, il voit passer Amélie dans la rue, la voit entrer dans une maison voisine, surprend un regard qu’elle lui lance furtivement, et reste longtemps la vue fixée sur les murs