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des Romagnes, et Rome elle-même. Les événements se sont chargés de résoudre en apparence cette contradiction ; en fait, le pouvoir temporel a disparu ; la cité pontificale est devenue la capitale de l’Italie unifiée, sans que l’indépendance spirituelle du Pape paraisse en avoir souffert, sans même que la liberté de son langage s’en soit jusqu’à présent ressentie. Mais, en théorie, la question demeure entière et n’est pas d’une solution facile. La garantie de cette indépendance par une loi italienne n'en est pas une, car un revirement politique peut abroger cette loi, et lors même qu’elle deviendrait une sorte de loi internationale garantie par les puissances catholiques ou ayant des sujets catholiques, on ne voit pas trop comment cette garantie en fait pourrait s’exercer. En cas de violation, on ne s’imagine pas une guerre s’ouvrant pour garantir la garantie. Il faut donc reconnaître qu’une souveraineté territoriale, si exiguë soit-elle, ne dût-elle comprendre que le Transtévère et la cité Vaticane, mais donnant le droit au Souverain Pontife d’être représenté à la Société des Nations, est peut-être nécessaire à son indépendance et que la question du pouvoir temporel, de sa nécessité, de son maintien ou de son rétablissement n’est peut-être pas aussi définitivement résolue qu’elle parait l’être. L’avenir en décidera.

Ces questions redoutables[1] et leurs conséquences n’assaillaient probablement pas encore l’esprit de Napoléon III lorsque, quittant les Tuileries par la rue de Rivoli pour gagner la gare de Lyon, il recueillit, pour la première fois, sur son passage des marques de la sympathie populaire. La guerre contre l’Autriche, peu aimée, plaisait, en effet, au peuple de Paris et, d’une façon plus générale, à la France, bien qu’on commençât de trouver que, pour un régime qui avait pris comme devise de sa politique extérieure : « l’Empire, c’est la paix, » deux guerres en six ans, c’était beaucoup. Mais l’armée n’était pas ce qu’elle est devenue depuis le service obligatoire. Son entrée en campagne ne troublait pas le pays dans ses profondeurs. Elle était une minorité dans la nation, et comme la France est toujours éprise de gloire, les brillantes victoires de Magenta et de Solférino, bien qu’une courte campagne eut déjà révélé quelques défectuosités de notre organisation militaire, causèrent à ce que j’appellerai le gros public une légitime satisfaction. Le traité de

  1. Elles viennent d’être récemment soulevées à nouveau dans une thèse pour le doctorat par le comte Le Marois.