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enfant, vu passer du balcon de M. Lebrun[1], qui n’était pas encore sénateur et qui demeurait sur le quai Voltaire, le cortège qui menait l’enfant nouveau-né à Notre-Dame pour son baptême. Paris, ce jour-là, ne trahissait pas son opposition. Il la manifesta plus tard, car l’opposition est une des formes de l’esprit parisien, par la nomination de ceux qu’on appela longtemps les cinq, dont trois, Jules Favre, Ernest Picard, Émile Ollivier étaient députés de Paris[2]. Mais ce ne fut qu’à partir des élections de 1863 que l’opposition prit une forme collective et sérieuse. Ce qui rendit aux opposants la hardiesse plus facile, ce ne fut pas seulement une administration qui se relâchait de sa sévérité, et la législation plus libérale qu’avaient inaugurée les décrets du 24 novembre 1860, ce furent les conséquences qui découlèrent de la guerre d’Italie.


III


L’empereur Napoléon III a été sur certains points si injustement attaqué et calomnié, que je ne voudrais pas paraître me ranger parmi ses détracteurs systématiques ; mais il est difficile cependant de ne pas reconnaître que, le 1er  janvier 1859, jour où, s’adressant, en pleine paix, à l’ambassadeur baron de Hubner, il lui dit qu’il regrettait que les relations de la France avec l’Autriche ne fussent plus aussi bonnes que par le passé, il obéit assurément à des suggestions personnelles.

Durant sa jeunesse où il tenait un peu de l’aventurier, Napoléon III avait été en relations avec les révolutionnaires qu’on appelait alors les carbonari italiens. Son frère aîné, mort peu de temps après, et lui-même avaient été compromis dans une échauffourée provoquée par eux. Qu’il y ait eu, pendant cette période de sa vie, des engagements pris par lui avec ce parti, pour moi cela n’est pas douteux, et les attentats successifs de Pianori et d’Orsini ne furent que des rappels à ces engagements.

De l’attentat de Pianori qui tira sur l’Empereur en plein Champs-Élysées, je ne sais rien, mais j’ai des raisons person-

  1. I1 y a eu plusieurs Lebrun diversement célèbres ; celui dont je parle est l'auteur, entre autres œuvres, du Cid d’Andalousie, Alexandre Dumas fils lui a succédé à l’Académie française.
  2. Darimon le quatrième était député de Brest ; le cinquième, très peu connu, s'appelait Hénon.