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technique de l’artillerie n’en avait jamais eu que cent trente qui s’engloutirent dans nos premiers revers. Elles provenaient peut-être bien de source allemande ; car en 1915, il n’y avait pas de fabrication organisée en France pour cet appareil. Sans perdre une minute, le Service géographique en fît créer l’outillage compliqué et en pressa la construction. Celle-ci exigeait une précision mécanique toute exceptionnelle, dépassant de beaucoup la pratique courante de l’industrie. Au prix d’efforts incessants, on parvint, à partir d’octobre 1915, à une production mensuelle de trente pièces, pour passer à cent pour le mois de janvier 1916, et continuer dans une progression constante. Finalement, au jour de l’armistice, le Service géographique avait réalisé la fabrication de onze mille lunettes binoculaires. Sur ce total, il en fut cédé :

A l’armée américaine............... 1 440

A l’armée anglaise............... 900

A l’armée italienne............... 111

A l’armée belge............... 52

A l’armée grecque............... 90

Il faut noter en plus la création d’une lunette monoculaire à trois grossissements, destinée à remplacer les anciennes lunettes terrestres qui étaient très encombrantes et d’optique médiocre. De ces lunettes monoculaires, il en fut fabriqué également 11 000. Enfin, plus tard, le Service géographique s’adjoignit en supplément la construction des objectifs de photographie pour l’aviation. Sous son impulsion féconde, le rendement mensuel de cette spécialité fut rapidement quadruplé. Si à ce bilan de fabrication déjà bien imposant, on ajoute des théodolites combinés pour l’artillerie à longue portée ; des lunettes avec un grossissement de cent fois pour des observations de travaux redoutables et devenus presque microscopiques par la distance, tels que l’amorçage à fleur de terre des mines souterraines de l’ennemi ; enfin si l’on tient compte des goniomètres boussoles (seize mille), pour toutes les batteries ; et plusieurs milliers de lunettes pour les chars d’assaut ; on pourra dire que le petit hôtel de la rue de Grenelle s’était transformé en un centre d’activité scientifique et industrielle assez puissant pour satisfaire sans délai à toutes les demandes d’une clientèle qui s’étendait effectivement de Salonique à Belfort.