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en réduisant les prix elle a vendu bien davantage. L’exemple est à retenir, et à suivre, car cette diffusion est de capitale importance.

L’influence de la presse ne cesse de croître dans le monde entier. Les grandes capitales possèdent des journaux à grand tirage, très sérieux et bien renseignés, qui paraissent sur douze à seize pages, un peu sur le modèle anglo-saxon.

C’est beaucoup par les annonces que les Allemands ont pris de l’influence sur certains d’entre eux, mais par les agences d’information ils les atteignent tous. Notre agence Havas est très utile, mais elle demande à être doublée par la télégraphie sans fil. Sur la côte du Pacifique, les renseignements arrivent seulement par les agences des États-Unis, qui sont nettement tendancieuses dans le sens allemand. Par exemple, c’est seulement par les journaux français que nous avons appris l’assassinat du commandant Montalègre en Haute-Silésie, et la nouvelle de cet événement, arrivée très tardivement, n’a pas produit le sentiment d’indignation qui l’eût certainement accueillie.

Nos journaux sont très lus et très appréciés, mais la distance est telle qu’on n’y cherche pas les nouvelles, transmises par le câble ou la T. S. F. et publiées par les journaux locaux depuis de longues semaines. Leur attitude sur les questions d’actualité et leurs articles de fond sont commentés, Oserai-je dire que la part faite au crime du jour par la plupart d’entre eux paraît vraiment un peu trop considérable ? Pendant tout notre voyage, à chaque escale, nous apprenions la découverte d’un nouveau cadavre, victime d’un Barbe-bleue de bas étage aujourd’hui oublié ; on pouvait penser que Landru tenait dans notre vie nationale une place capitale ; quelques attentats sur voie ferrée disputaient la première page à sa cuisine macabre ; la France donnait l’impression d’un pays peu sûr, et ce n’était certes pas exact. Dans les feuilles locales, les crimes même sensationnels ne dépassent jamais la huitième ou dixième page, qui correspondrait à la troisième page dans les nôtres. Serait-il possible d’obtenir par une entente discrète qu’aucun journal ne mette en vedette les crimes de droit commun ? Le public français n’y verrait que des avantages, car toutes les fois que j’ai eu l’occasion d’exprimer ce vœu devant lui, à Paris comme en province, j’ai été unanimement approuvé. Quelques-uns de nos quotidiens consacrent une rubrique spéciale à l’Amérique