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du Nord. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen devenait une sorte d’évangile ; le langage grandiloquent de l’époque trouvait un écho vibrant dans leurs cœurs. Napoléon, en renversant en Espagne le trône des Bourbons, détruisait le prestige de la métropole et donnait en même temps un prétexte à la révolte ; car les sujets loyaux ne reconnaissaient ni l’usurpateur ni la junte insurrectionnelle de Cadix : la disparition du Roi légitime donnait à ces peuples la liberté. Encore aujourd’hui ils sont doublement reconnaissants à la France d’avoir semé parmi eux l’idée de l’indépendance et de leur avoir permis de la réaliser. Depuis deux siècles ils ont vécu notre histoire intellectuelle et militaire ; et la France leur apparait avec le prestige de la pensée libératrice et de l’épée victorieuse.

Les Latins sont 90 millions en Amérique, des frontières du Mexique au détroit de Magellan, et 120 millions en Europe ; les Africains et les Asiatiques qu’ils protègent sont 60 millions, et une politique avertie en fait des collaborateurs dont le dévouement vient d’être mis à l’épreuve. Ce total de 270 millions peut figurer en face de celui des Anglo-Saxons, qui sont deux cents millions de langue anglaise et avec lesquels on ne peut compter les Hindous inassimilables ; — des Germains, qui ne seraient cent millions que si, aux Allemands, on pouvait additionner les Scandinaves, les Hollandais, les Suisses alémaniques ; — des Slaves, dont les 120 millions sont bien divisés.

La Société des Nations est représentée par une Assemblée et par un Conseil Où chaque Puissance ne dispose que d’une voix.

L’Amérique latine compte pour 17, et l’Europe latine pour 6 Voix, soit 23 latines sur un total de 44.

Ces Latins se reconnaissent entre eux par l’analogie de leur langue, leur compréhension rapide, leurs sensations communes ; émus par les mêmes formes de l’éloquence, ils réagissent de même ; ils ont la même foi et les mêmes négations, car ils ont toujours adoré les mêmes dieux. La hardiesse de leur pensée s’accompagne trop souvent d’un certain dédain du fait matériel et leur logique inflexible recherche l’absolu, l’application immédiate de principes théoriques. Les mêmes luttes intestines les divisent et même les déchirent, car ils