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des États ne se soucièrent même pas d’admettre les autres.

Enfin une bureaucratie de plus en plus compliquée découragea les émigrants, qui sont encore pour la plupart des illettrés. Dans ces derniers temps, les attaques se sont faites très nombreuses et très vives contre l’Office National d’Émigration, qui, érigé en ente autonomo, échappe au contrôle régulier du Parlement et passe pour n’avoir pas toujours usé de son indépendance au mieux des intérêts du pays. La réforme de cette organisation est une de celles que les fascistes ont réclamée avec le plus d’insistance et le plus de raison. Tant que l’Italie n’aura pas transformé radicalement, — et ce ne peut être l’œuvre d’un jour, — les conditions d’une importante fraction de son territoire, elle devra se préoccuper d’assurer à l’excès toujours croissant de sa population des débouchés réguliers, commodes et suffisamment avantageux. Une coordination étroite des services d’émigration avec les bureaux de placement à l’intérieur permettra d’éviter que des crises de chômage se produisent dans les centres trop peuplés et que des crises de main d’œuvre, comme celle de 1920 en Sicile, se vérifient dans les provinces où l’émigration est la plus nombreuse. La nécessité d’une intervention de l’État ne parait pas discutable ; la question est de savoir sous quelle forme et selon quelles méthodes l’Etat doit intervenir, pour subordonner les mouvements de la main d’œuvre aux besoins et aux intérêts de la collectivité, sans porter atteinte à la liberté de chacun et sans tarir cette source précieuse de richesse et de progrès qu’est l’initiative individuelle.


MAURICE PERNOT.