Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 15.djvu/697

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

REVUE LITTÉRAIRE

LE ROMANCIER DES BÊTES, LOUIS PERGAUD[1]

« Quand Louis Pergaud arrivait chez moi, le dimanche, j’avais l’impression que l’on ouvrait une fenêtre… » Ainsi commence une notice consacrée à Louis Pergaud par M. Lucien Descaves. Et je n’ai pas connu l’auteur de Goupil à Margot ; mais, à le lire, on a vraiment cette impression d’une fenêtre qui s’ouvre sur la campagne et qui laisse entrer le grand air des prés et des bois : quelle aventure, bien étonnante, pour les gens de lettres de Paris, un peu confinés et rencognés ! Pergaud-le-rustique, dit encore M. Lucien Descaves. Il était de la campagne, qui n’est pas du tout la même chose que la nature. La nature, c’est de la poésie, ou de la philosophie. Mais la campagne : vous n’en avez aucune idée.

Louis Pergaud aurait à peine un peu plus de quarante et un ans. Mais il est mort, au printemps de 1915, à la guerre : il avait trente-trois ans. Il était né dans la belle province de Franche-Comté, fils d’un instituteur ; et il a été lui-même instituteur, un peu de temps. Après cela, il vint à Paris et fut employé à la préfecture de la Seine, dans les bureaux de l’enseignement.

Pergaud dans les bureaux, et rond de cuir ! Pour deviner comme il a dû souffrir et manquer d’air, il faut le lire et voir, dans ses livres, l’homme qu’il était, un paysan, toujours dehors, qui chasse, qui baguenaude et qui ne préfère nulle compagnie à celle des animaux, même sauvages, nulle causerie au silence de la forêt.

  1. La vie des bêtes, études et nouvelles, suivies de Lebrac, bûcheron, roman inachevé, de Louis Pergaud (Mercure de France). Du même auteur, à la même librairie : De Goupil à Margot, La revanche du corbeau, La guerre des boutons, Le roman de Miraut, Les Rustiques.