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Addio, caro mio. Portez-vous bien et répondez au billet que je vous ai écrit à Paris il y a quelques heures ; je tiens singulièrement à vous présenter mon jeune homme, et à lui ménager auprès de vous un accueil après mon départ.

A rivederci.


Décidément Balzac est invisible ; Mme Carraud sans se lasser lui écrit le 7 avril 1840 :


Je vous ai envoyé mon numéro, mon cher Honoré, et je ne vous ai pas vu. Je tiens beaucoup cependant à vous présenter Ivan et son précepteur. Ne serait-il donc pas possible de vous voir aux Jardies, un jour que vous auriez la bonté de me désigner ? M. Ubicini [1] ne doit rester auprès d’Ivan et de son camarade que jusqu’à la fin de l’année ; il désire voyager et il cherche une éducation à faire en pays étranger, en Italie surtout, car aux cœurs bien nés... etc. Il vous sera peut-être agréable d’être salué par un sincère admirateur, vous à qui les ennemis ne manquent pas ; et par un admirateur éclairé et intelligent. Comme le monde n’a rien fait pour lui, que son frottement n’a poli aucune des aspérités de son étrange et riche nature, cet hommage ne sera pas vulgaire. S’il vous agrée, permettez-lui de vous voir quelquefois, à ses rares heures de liberté, c’est-à-dire une fois ou deux d’ici les vacances ; il a perdu toute foi en soi, cela l’empêche de travailler et paralyse ses moyens peu communs. Un suffrage tel que le vôtre aurait pour lui un prix inestimable et ranimerait ce beau feu, si près de s’éteindre. — Je ne reste que jusqu’au samedi saint ; tâchez donc que je puisse vous voir avant mon départ, un jour de congé, à cause d’Ivan. Il ne se peut pas que je quitte Paris sans nous avoir dit adieu.

Je suis allée chez Laure demander au portier si vous étiez là ; et puis, 108, rue de Richelieu [2] ; j’ai eu partout une réponse négative. Adieu, je vous tends la main. Portez-vous bien.

ZULMA.

  1. Né à Issoudun, en 1818, M. Ubicini passa nombre d’années en Roumanie et y prit une part active à l’insurrection de 1848. On lui doit de nombreux ouvrages sur l’Orient, la Turquie et les principautés danubiennes.
  2. Où Balzac avait un pied-à-terre, chez Buisson, son tailleur.