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et qui doit assurer la maîtrise de la mer pour la sécurité de toutes les communications de l’Entente.

Nous voyons la lutte inégale s’engager à la fin du jour et se poursuivre par une mer très forte, plus sensible aux navires anglais de petit tonnage dont le tir est mal assuré ; le Good Hope désemparé coule, son pavillon toujours hissé ; le Monmouth s’échoue, et les trois croiseurs anglais qui restent ne peuvent poursuivre cette lutte inégale. Le 8 décembre, l’amiral Sturdee vengera ce glorieux échec et détruira toute l’escadre allemande dans les eaux des Iles Falkland. La fanfare du Jules Michelet joue le God Save the King, l’équipage présente les armes et le pavillon français salue longuement. Il m’a semblé qu’il devait rester trace de cette leçon d’héroïsme donnée à nos matelots et la télégraphie sans fil en a transmis le compte rendu au ministre d’Angleterre à Santiago et au consul de Valparaiso, qui avaient tous deux montré une grande sympathie à la mission français


Nous sommes sur les mers les plus tumultueuses du monde, où les lames s’élèvent jusqu’à 22 mètres de hauteur. Mais le temps est relativement favorable. D’ailleurs, l’amiral a pris la décision de passer par les canaux latéraux, à travers les îles qui bordent la côte américaine du Pacifique Sud. Nous avons de bons pilotes ; l’amirauté chilienne a bien voulu nous prêter un

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  1. A mon retour à Paris, j’ai reçu la lettre suivante de lord Harding of Penshurst, ambassadeur d’Angleterre à Paris.
    Mon général,
    Au cours de votre récent voyage en Amérique du Sud, vous avez trouvé plusieurs fois l’occasion de prononcer des paroles nobles et généreuses à l’égard de mon pays. Vous ne vous êtes pas restreint à rappeler à ces pays lointains le souvenir héroïque de la France ; vous avez tenu à y associer celui de son ami et allié.
    Mon Gouvernement m’a prié d’être son interprète auprès de vous pour vous exprimer la satisfaction qu’il a éprouvée en apprenant ces généreux tributs. La nouvelle que vous avez commémoré par une prise d’armes la bataille navale de Coronel lui a causé une profonde émotion, et je suis chargé de vous adresser ses vifs remerciements de ce geste gracieux, auquel il a été particulièrement sensible.
    Tout en m’acquittant de cet agréable devoir, je m’empresse de vous offrir mes félicitations les plus cordiales sur le succès éclatant de votre mission.
    Je vous prie d’agréer, mon général, l’expression de ma haute considération.
    Signé : HARDING OF PENSHURST.