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9-15 septembre. — Nous revoici en mer. Une fois de plus, nous échangeons nos impressions et nous fixons nos souvenirs. C’est bien un peuple uni, fort, étonnamment évolué, qui vient d’accueillir les envoyés de la France par des manifestations de sympathie qui ont été souvent jusqu’à l’enthousiasme.

Cette nation est justement fière d’appliquer effectivement les principes de ses institutions libérales. Elle supporte courageusement la crise mondiale ; et, faisant appel à la science des économistes français pour l’établissement de son régime financier, elle indique bien son intention de rechercher l’équilibre budgétaire dans un système d’impôts parfaitement sain, qui cessera de reposer pour les trois quarts sur le produit aléatoire de ses importations et de ses exportations. La dette publique n’est pas exagérée et les engagements pris par le Gouvernement ont toujours été remplis avec une exactitude scrupuleuse ; au moment des troubles qui ont causé un commencement de guerre civile rapidement arrêté, chacun des deux partis avait garanti le paiement de la dette, et cette préoccupation en de pareils moments montre le prix que tous attachent à la bonne réputation financière du pays.

L’industrie donne mieux que des espérances ; les réalisations commencent et gardent un caractère national, malgré l’appel nécessaire aux capitaux étrangers.

Officiellement, la France est représentée avec beaucoup de distinction. En outre, quelques-uns de nos nationaux sont à la tête d’entreprises florissantes et l’ensemble de la colonie française se présente fort bien. Il n’est guère de pays étrangers où la langue française soit aussi couramment parlée, où notre littérature et nos arts soient appréciés avec autant de goût, où la pensée française soit aussi bien comprise.

Il reste à expliquer pourquoi le Chili est resté neutre pendant la guerre mondiale, et ici il faut faire appel à ceux de nos nationaux qui y sont restés pendant les hostilités parce que leur âge les éloignait des champs de bataille. D’abord, le Chili est reconnaissant à l’Allemagne de ses sympathies pendant la guerre du Pacifique de 1879-1883. M. de Bismarck aurait empêché une intervention des Etats européens, à laquelle les conviait les États-Unis du Nord, dont la politique étrangère était alors