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manifestation de ce fait que, en dépit de la mobilité des limites tracées par les guerres et les traités, la Picardie, consciente d’une ancienne unité historique et linguistique, possédait une vie littéraire commune, très apparentée d’ailleurs à celle du reste de notre pays, auquel le Hainaut devait donner des poètes comme Jean Lemaire de Belges, des musiciens comme Josquin des Prés, tandis que Valenciennes devait prendre à Saint-Quentin Jean Molinet. Celui-ci assista à la représentation de juillet 1501, se mêlant ensuite à la compagnie du roi Hérode (les acteurs festoyaient ainsi par groupes, Dieu et les siens ne frayant guère avec les démons) : Au roi Hérode, pastoureaux et autres, en nombre 22 personnes et plus, et où était Moulinet de Valenciennes, ce dit jour, au sonner, au Cerf, donné soixante-dix sous.

Que l’attention et la curiosité dont nous parlions se soient parfois démenties pendant les huit jours que dura la représentation, du lundi 5 au lundi 12 juillet 1501, c’est ce qu’atteste le tableau des recettes que voici, où le terme Journée correspond à la fois à la matinée et à l’après-dîner.

Lundi 5 juillet, première journée : 224 l. 16 s. 6 d.
Mardi 6 juillet, seconde journée : 147 l.14 s.
Mercredi 7 juillet, troisième journée : 123 l. 13 s. 6 d.
Jeudi 8 juillet, quatrième journée : 126 l. 11 s.
Vendredi 9 juillet, cinquième journée : 153 l. 6 s. 6 d.
Samedi 10 juillet, sixième journée : 122 l. 9 s. 6 d.
Dimanche 11, septième journée : 316 l. 9 s. 6. d.
Lundi 12 juillet, huitième et dernière journée : 103 l. 14 s.

Le total, en y ajoutant le prix de quelques toiles revendues, fut de 1 338 livres, 4 sous, 4 deniers. Il résulte de ce tableau des entrées que, vive au début, la curiosité et, partant, l’affluence diminuent le second, le troisième et le quatrième jour, se relèvent le cinquième (serait-ce à cause de la Mondanité de Madeleine et de la Résurrection de Lazare ?), s’abaissent de nouveau le sixième, pour atteindre leur maximum le dimanche 11 juillet. Il est vrai que, ce jour-là, s’est jouée la Passion proprement dite avec ses pompes, ses cortèges, ses horreurs et ses gloires, que les artisans chôment tous, et que les gens des villes voisines ont plus de loisir pour entreprendre le voyage de Mons. La recette du dernier jour, consacré à la Résurrection, est la