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fondateur ; celle de Ferrare, créée en 1744 ; celle d’Estavayer en Suisse, qui datait de 1750 ; et le collège de Fort Royal à la Martinique, où l’on avait introduit les Frères en 1774 : c’étaient là les premières amorces de l’expansion future, mais elle ne s’essayait encore qu’avec discrétion, avec timidité. Lorsque, après la tourmente, l’Institut des Frères put reprendre en France son activité pédagogique, le Frère Gerbaud, devenu général en 1810, — un général qui ne régnait d’abord que sur une armée de 160 religieux, — organisa la province de Belgique ; et le Frère Guillaume de Jésus, qui lui succéda de 1822 à 1830, fit s’essaimer les Frères à l’ile Bourbon, à Cayenne, en Italie, en Savoie, en Floride, à la Martinique. Avec le Frère Anaclet, général de 1830 à 1838, ils prirent racine au Canada, par leurs écoles de Montréal. Puis, trente-six ans durant, les destinées de l’Institut furent gérées par le Frère Philippe, et les Frères pénétrèrent alors en Algérie, en Cochinchine, en Angleterre, aux États-Unis, en Autriche, en Allemagne, en Turquie, en Egypte, aux Indes orientales, dans la République de l’Equateur. Sur mille deux maisons nouvelles créées durant le généralat du Frère Philippe, deux cent soixante-seize furent ouvertes à l’étranger. À son avènement, il commandait un régiment de deux mille sept cents hommes ; le régiment, à sa mort, avait plus que quadruplé ; il était devenu une .véritable petite armée, comprenant onze mille cinq cent soixante-dix unités ; et ces onze milliers de Frères, enrôlés sous une discipline d’ascèse pour le bon combat contre l’ignorance, portaient désormais la lutte sous toutes les latitudes et dans tous les continents. Le sol d’Espagne et d’Irlande, de Palestine et d’Asie-Mineure, le Chili, certains États de l’Amérique centrale, leur furent ensuite hospitaliers ; et l’on peut dire que l’Institut, au cours du XIXe siècle, avait acquis, dans toute la force du terme, un rayonnement international[1].

« Son action éducatrice et sociale, écrivait en 1900 M. René Leblanc, inspecteur général de l’Université, et rapporteur du jury de l’Exposition universelle de Paris, s’exerce, en France et à l’étranger, sur 400 000 enfants, jeunes gens et adultes. Propagé aujourd’hui dans toutes les parties du monde, l’Institut des Frères des Ecoles chrétiennes reste fidèle à ses traditions

  1. Voir J. Herment, Histoire de l’Institut des Frères des Écoles chrétiennes, 1923 (Namur, Gauthier, 1922}.